Birobidjan, une Terre promise méconnue en Sibérie…

Réservé à la population juive dès 1928, encouragée à s’y installer en contrepartie de primes, l’Oblast autonome juif du Birobidjan est officiellement créé en 1934 par Joseph Staline.

Lovée dans les méandres du fleuve Amour, inhospitalière et glaciale – les températures peuvent descendre jusqu’à -50°, le choix de cette région fut avant tout politique et tactique. En offrant ainsi une terre au Peuple juif, on ne pouvait accuser le régime soviétique d’antisémitisme.

De plus, contestée par la Chine voisine, il était nécessaire de peupler et de développer cette région où tout était à faire. Sans oublier qu’ainsi « exilés » à 7.000 kilomètres de Moscou, les nombreux intellectuels juifs devenaient moins dangereux, et consacreraient à n’en point douter leur nouvelle existence au travail agricole. C’était du moins ce que pensait Staline.

Bien qu’implantée loin de tous les lieux liturgiques de la communauté juive de Russie, des milliers de personnes décident cependant de partir s’y installer, pensant à la fois mettre fin à un exode de plusieurs siècles, mais aussi s’éloigner le plus possible d’une Europe devenue folle sous le joug d’Hitler.

Très vite, les premiers immigrants sont rejoints par de nombreux autres, venus de France, des Etats-Unis, ou encore d’Amérique du Sud.

Mais même si la population juive frôle, dans sa meilleure période, environ 30.000 âmes, on restait très loin du demi-million qu’espérait Staline.

Avec le yiddish comme langue officielle – l’hébreu, réservé à la liturgie, étant interdit par le pouvoir, le premier « État Juif » sort du sol. Des maisons se construisent par centaines, des routes sont tracées, une synagogue et un théâtre sont érigés, des écoles sont créées… On y publie même un journal en yiddish, « L’Etoile du Birobidjan ». Un journal de deux pages, certes, mais un journal tout de même.

L’année 1945 et la fin de la Seconde guerre mondiale verront l’effondrement pur et simple du grand projet stalinien. Si dans les trois années suivant la fin du conflit, quelques milliers de juifs s’installent encore au Birobidjan, le mois de mai 1948 et la création de l’Etat d’Israël mettront un terme définitif à cette nouvelle Terre promise.

Pour les Juifs du monde entier, il n’est plus question d’aller s’installer sur une terre hostile de Sibérie, deux fois plus vaste que leur nouvel Etat.

Un demi siècle plus tard, le Birobidjan perd définitivement son caractère de région autonome juive. Il ne reste aujourd’hui que peu de traces du judaïsme, si ce ne sont la synagogue, la ménorah située sur la place de la gare, quelques monuments sur lesquels les noms sont à la fois inscrits en alphabets yiddish et cyrillique, ainsi que les deux pages de « L’Etoile du Birobidjan », rares vestiges de ce qui fut durant une quinzaine d’années le premier « État Juif ».

Si vous désirez aller plus loin :

L’inconnue de Birobidjan, de Marek Halter, aux éditions J’ai Lu. 480 pages. 8.20€.
Territoires de l’exil juif : Crimée, Birobidjan, Argentine, de David Muhlmann. Editions Desclée de Brouwer. 228 pages. 19.00€.
Les mauvais juifs, de Gérald Shapiro, aux éditions Albin Michel. 278 pages. 19.40€.
Israël, Staline et les juifs, de Laurent Rucker, aux éditions PUF. 384 pages. 22.50€.

Incoming search terms:

  • https://cultures-j com/birobidjan-une-terre-promise-en-siberie/
  • bironidjan

Partagez vos impressions

Cet article vous intéresse ? Laissez un commentaire.

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.