« Du sacrifice », le nouveau livre de Moshé Halbertal

Souvent dans les conversations revient la question d’un lien entre religion et violence. Dans son livre Du sacrifice, Moshe Halbertal, philosophe, partage à partir de la notion de sacrifice sa réflexion à ce sujet.

du sacrifice moshe halbertalSon livre démarre entre autre par une explication de vocabulaire avec la différence entre « sacrifier à » et « sacrifier pour ».

La première partie est consacrée au fait de « sacrifier à ». Elle s’articule autour du Temple à Jérusalem et des différentes lois qui concernent les sacrifices. Elle parle du lien entre sacrifice et violence, et l’attitude de D.ieu face aux différents sacrifices décrits dans la Torah est aussi analysée. Elle est multiple. Puis après la destruction du second Temple, l’auteur étudie les changements que cela impliqua et par quoi les sacrifices furent substitués, autant dans le monde Juif que dans le monde chrétien.

Dans la deuxième partie, Moshé Halbertal parle du sacrifice non plus « à » mais « pour ». Il explique comment il s’articule entre l’amour de soi et l’impératif moral. Pour se faire, il s’appuie d’abord sur Kant, pour finalement le dépasser et introduire d’autres paramètres.

Cet ouvrage montre comment, par un glissement pas forcément religieux comme dans Les Justes de Camus, l’impératif moral peut amener le meurtre de l’autre dans un sens du sacrifice vicié et détourné de son sens premier. Ainsi, des gens très moraux peuvent tuer par devoir pour un idéal qui, pour eux, le rend nécessaire.

Ceci dit, une religion aussi peut amener à tuer quand elle devient idolâtrie. En ce qui concerne sacrifice et guerre, une analyse par l’auteur des lois de la guerre par un prisme philosophique montre que sacrifice et violence y sont totalement imbriqués. Il est aussi des états pour lesquels les sacrifices fondateurs rendent les générations suivantes redevables envers ses morts. Le futur se trouve ainsi otage du passé.

Ce qui amène à parler de l’ambiguïté de la formation d’un Etat. En effet, des individus se soumettent à un autre contre une protection qui parfois oblige de passer par une guerre. Alors l’état, supposé protéger ses citoyens, les envoie sur un champs de bataille. Cependant, même en temps de paix, il s’avère que l’état peut demander à l’individu de sacrifier une partie de lui-même au bien-être commun. Quand ce qu’acceptent les citoyens devient trop pesant, Moshé Halbertal montre qu’on peut soupçonner l’Etat lui-même d’être devenu une idole.

La conclusion quant à elle est aussi riche que le reste du récit, et ouvre de nouvelles portes de réflexion.

Du sacrifice est réellement intéressant par son articulation et ses idées. Il étudie les points résumés ci-dessus de façon organisée et dynamique. Si le sujet peut sembler aride, le livre ne l’est vraiment pas.

Sophie MASSON pour Cultures-J.com.

Du sacrifice, de Moshé Halbertal, aux éditions de la revue Conférence. 18,00€.

Si vous désirez aller plus loin :

Le Peuple du Livre : canon, sens et autorité, de Moshé Halbertal, aux éditions In Press. 235 pages. 25,40€.

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