« Les fantômes de la rue Papillon » : conflit de génération au paradis…

Paris, janvier 2017. Assis sur son banc, comme à l’accoutumée, Joseph Wyler observe les passants et l’agitation de la rue Papillon, dans le 9ème arrdt.

Depuis le temps qu’il assiste en spectateur à leurs allers et venues, il connait les moindres faits et gestes de chacun.

Soudain, un halo de gyrophares et un contrôle d’identité qui tourne mal. Des coups de feu résonnent. Pour un téléphone portable que des policiers ont pris pour une arme, le jeune Haïssa est abattu. Et le voici qui rejoint Joseph Wyler, spectateur impuissant du drame.

Lorsque l’on meurt à un endroit, on y renait… en fantôme. Pour l’éternité. Si Haïssa vient tout juste de franchir cet « au-delà », Joseph, lui, s’y trouve depuis plus de soixante-dix ans. Depuis le 16 juillet 1942 très exactement, date de la grande rafle des Juifs de Paris. La rafle du Vél d’Hiv. L’étoile jaune sur sa veste en témoigne. Luthier, il habitait au numéro 4 de la rue Papillon. Un matin, la police française est venue frapper sa porte. Et…

Déconcerté, Haïssa ne comprend pas, cherche à fuir entre une porte fermée et un D.ieu qui en a décidé autrement.

Condamnés à « vivre » ensemble, le jeune algérien et le vieux juif vont apprendre à se connaitre, et à communiquer avec des mots que ni l’un ni l’autre ne semblent comprendre. Conflit de génération.

Les deux hommes s’appréhendent, évoquent l’actualité : le terrorisme islamique, le racisme envers les musulmans, l’antisémitisme contemporain, l’intolérance… Un choc pour Joseph, coupé de la réalité depuis des décennies, et qui ignore tout de ce qui s’est passé depuis cette matinée de juillet 1942.

Haïssa, lui, le sait. La Shoah est enseignée à l’école. Mais comment raconter l’inénarrable à ce vieil homme, qui se demande encore ce que sont devenus son épouse et ses trois enfants ?

Si le rire commun des deux hommes permet une ouverture temporaire vers le monde réel, ouverture qui va permettre à Haïssa de revenir avec un iPad « de prêt » pour aider Joseph dans la recherche de sa famille, Les fantômes de la rue papillon est avant tout un spectacle conjuguant tolérance, vivre ensemble et devoir de Mémoire.

Emouvant, très drôle malgré des sujets graves, Eddy Moniot et Michel Jonasz, à l’affiche entre autre du seul en scène Abraham de 2009 à 2011, forment sur scène un tandem complice et crédible, avec la participation exceptionnelle de Judith Magre.

Quant au parallèle fait entre 1942 et 2017, son jugement sera laissé à la discrétion de chacun.

Les fantômes de la rue Papillon, actuellement au théâtre la Bruyère.

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