« Passeport rouge », de l’amour parisien au piège moscovite

Paris, 1932. Anne-Marie Lotte, pianiste dans le très artistique quartier du Montparnasse, épouse Lvovitch Rabinovitch, dit « Rabi », un jeune sculpteur Juif originaire d’Odessa, en Ukraine.

passeport rouge moscou lotte comedie tour eiffelL’amour, mais aussi la montée de l’antisémitisme en Europe, vont contraindre le jeune homme à se convertir au catholicisme et à rentrer dans sa Russie natale afin de s’y sentir, peut-être, plus en sécurité. Ne voyant pas se profiler la menace d’une guerre mondiale, ce sera par amour également qu’Anne-Marie Lotte adoptera la nationalité russe et rejoindra Rabi à Moscou en 1937. Mais à son arrivée dans la capitale russe, l’homme qu’elle retrouve n’est plus celui qu’elle avait quitté à Paris. Distant, vivant dans la crainte permanente d’être écouté ou entendu – une épouse étrangère représente un danger permanent –, il conduit Anne-Marie dans un foyer communautaire tandis que lui loge dans une cité d’artistes construite par Boris Iofane, à deux pas du Kremlin.

Seule, ne s’habituant pas dans ce pays dont elle ne connait même pas la langue, Anne-Marie souhaite rentrer à Paris. Mais désormais citoyenne russe et titulaire du fameux passeport rouge, elle ne peut plus quitter le pays. Et mieux éviter de faire des demandes de visas trop fréquentes, cela pourrait éveiller les suspicions du NKVD.

En juin 1941, l’armée allemande attaque l’URSS. Les bombardements, les abris souterrains, le rationnement et la faim deviennent alors le quotidien d’Anne-Marie et de millions d’autres russes pris au piège.

Dans une mise en scène signée Katia Ogorodnikova, Aurélie Valetoux, formée à Moscou et Saint-Pétersbourg – il n’y a pas de hasard –, porte sur scène la parole du témoignage de Lucile Gubler, la petite-fille d’Anne-Marie Lotte. Elle transforme tour à tour au fil du récit les quatre valises – objets symboliques – constituant le décor en quai de gare, en foyers pour étrangers, en magasins, sortant par moments des vêtements, des photographies, des papiers…

Adapté du livre Parlez-moi d’amour. Une française dans la terreur stalinienne, réédité chez Anne Rideau éditions dans une édition enrichie, Passeport rouge est un magnifique témoignage de courage et d’espoir sur fond d’amour et de totalitarisme, joué devant une salle pleine à craquer à chaque représentation.

Un spectacle comme on en voit rarement.

Passeport rouge, tous les jeudis jusqu’au 26 juin à la Comédie Tour Eiffel.

Commandez le livre Parlez-moi d’amour. Une française dans la terreur stalinienne sur le site des éditions Anne Rideau.

Si vous désirez aller plus loin :

La terreur et le désarroi, de Nicolas Werth, aux éditions Perrin. 614 pages. 11,00€.
L’ivrogne et la marchande de fleurs, de Nicolas Werth, aux éditions Points. 335 pages. 9,60€.
Staline, la cour du tsar rouge T1 : 1878-1941, de Simon Sebag Montefiore, aux éditions Perrin. 720 pages. 12,00€.
Staline, la cour du tsar rouge T2 : 1941-1953, de Simon Sebag Montefiore, aux éditions Perrin. 620 pages. 11,70€.

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