« 24 jours. La vérité sur l’affaire Ilan Halimi » : le drame porté à l’écran par Alexandre Arcady

Le 20 janvier 2006, Ilan Halimi est kidnappé à Sceaux, séquestré et torturé à Bagneux dans un logement vacant, puis dans une chaufferie par le « gang des barbares », juste parce qu’il était Juif. De toute évidence, il avait donc de l’argent et appartenait à une communauté soudée.

Dans le nouveau film d’Alexandre Arcady, Ruth, la mère d’Ilan Halimi, revient sur ces « 24 jours » de cauchemar, marqués par plus de 600 appels téléphoniques de menaces, d’insultes et de demandes de rançon ; des photos de son fils ligoté, torturé, des extraits audio d’Ilan appelant à l’aide.

Tout est cruellement vrai dans ce film. On assiste à toutes les étapes de l’affaire, depuis sa rencontre avec une fille qui va servir d’appât jusqu’à la découverte de son corps, agonisant, le long d’une voie de chemin de fer à Sainte-Geneviève-des-Bois.

Toutes les scènes ont été filmées dans les lieux réels : au 36 quai des Orfèvres, où l’enquête a été menée — c’est la première fois que le tournage d’un film y est autorisé —, la boutique de téléphonie où travaillait Ilan Halimi, boulevard Voltaire, le cybercafé dans lequel Youssouf Fofana le « chef » du gang envoyait ses mails, la cité de Bagneux… Ce qui laisse peu de place à la fiction et renforce le sentiment de vérité de ce drame.

Au cours du film, on découvre que la mort aurait sans nul doute pu être évitée. Malgré le déploiement considérable de policiers sur l’enquête jours et nuits, la police a commis de nombreuses erreurs, et avant tout le manque de considération de l’affaire, comme la non-prise en compte de la possibilité d’un acte antisémite. A plusieurs reprises, Fofana aurait pu être interpellé (contrôle d’identité, intervention ratée dans le cybercafé où la police savait qu’il venait pourtant régulièrement, les contrôles douaniers lors de ses allers et retours pour la Côte d’Ivoire…).

S’ajoute enfin la loi du silence dans la cité où le jeune garçon était détenu. Nombreux sont ceux à avoir vu ou entendu quelque chose, mais dans ces no man’s land où la peur domine et l’emporte sur la solidarité, chacun s’est tu.

Valérie Benguigui, qui tenait beaucoup à jouer le rôle de Ruth Halimi, dut malheureusement y renoncer suite à son hospitalisation deux semaines avant le début du tournage. Elle fut remplacée par Zabou Breitman, qui incarne le personnage de Ruth avec beaucoup de sincérité, laissant transparaître toutes les émotions ressenties lors de ces 24 jours d’horreur : peur, espoir, désespoir, révolte, colère, puis finalement le deuil.

Pascal Elbé quant à lui interprète Didier, le père qui éprouve de la culpabilité, et semble perdu et résigné. Principal interlocuteur avec le ravisseur, il s’en remet à la police qui mène l’enquête. Divorcés depuis plus de vingt ans, ces parents vont se retrouver pour tenter de sauver leur fils.

Un film choc et bouleversant joué avec justesse, et qui témoigne du martyr d’Ilan Halimi. Plus qu’un fait divers, c’est un phénomène de société, une prise de conscience de l’antisémitisme toujours présent, quoiqu’on en dise.

Ilan Halimi avait 23 ans, et la vie devant lui. Initialement inhumé à Pantin, il repose aujourd’hui au cimetière Givat Shaul de Jérusalem, en Israël.

24 jours, la vérité sur l’affaire Ilan Halimi, d’Alexandre Arcady. DVD. 106 minutes.

Si vous désirez aller plus loin :

24 jours : La vérité sur la mort d’Ilan Halimi, de Ruth Halimi et Emilie Frèche, aux éditions Points. 140 pages. 6,70€.
Tout, tout de suite, de Morgan Sportès, aux éditions Livre de Poche. 432 pages. 7,90€.
Le gang des barbares : Chronique d’un fiasco policier, d’Alexandre Levy, aux éditions Hachette. 283 pages. 18,30€.

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