« Vers la disparition d’Israël » : l’étude du philosophe Ami Bouganim

Vers la disparition d’Israël. Pour effrayant qu’il soit, ce titre-choc n’est aucunement en lien avec l’actualité ni le programme nucléaire iranien comme on pourrait le penser de prime abord. Ni avec les terroristes du ‘Hamas ou ceux du Hezbollah. Ni même avec les Frères Musulmans et autres Salafistes qui, grâce aux « Printemps arabes » applaudis des deux mains par des occidentaux naïfs, occupent une position de plus en plus affirmée tout autour du bassin méditerranéen. Non, rien de tout cela.

vers la disparitionVers la disparition d’Israël dresse en réalité un constat qui, s’il peut choquer, ne s’avère pas moins nécessaire.

Même s’il est vrai que depuis des décennies, l’Etat hébreu est au cœur d’un incessant et malsain processus de délégitimation, ce dernier n’est pas du seul fait de ses détracteurs les plus évidents, qui ne manquent jamais une occasion de cracher leur venin sur ce qu’ils considèrent à l’unisson comme le fléau mondial.

Certes, les intégristes et terroristes musulmans occupent une place de choix dans ce concert de dénis, mais y ont aussi leur part de responsabilités tous les tiers-mondistes et autres gauchos bien-pensants, criant à la face des nations leur antisémitisme qu’ils nomment antisionisme, et attribuant à Israël la responsabilité de toutes les haines du monde, et au Peuple Juif celle de tous ses maux. Mais il serait erroné, ou pour le moins incomplet, de s’arrêter à une analyse si facile. Si la majeure partie des campagnes de délégitimation proviennent effectivement de sources externes, de réels fléaux existent et évoluent librement et en toute impunité au sein même de l’Etat d’Israël, contribuant à l’entrainer dans une irrémédiable chute. La corruption et la perversion politique tout d’abord, si propre aux sociétés occidentales, qu’elles ont quasi-élevées au rang d’art, la présence d’ultra-orthodoxes ensuite, qui dénigrent l’état dans lequel ils vivent pourtant, refusant d’utiliser ses services, votant leurs propres lois, et allant même jusqu’à défiler aux côtés de terroristes iraniens ou apportant leur soutien à des bouffons comme Dieudonné Mbala Mbala. La place occupée par Israël dans l’actualité l’emporte trop souvent sur les raisons de sa création et « ses » histoires, biblique et contemporaine.

De l’Etat-providence, Etat-exemplaire, Etat-modèle rêvé par Herzl, que reste-t-il aujourd’hui ? Pendant des millénaires, les Juifs en exil n’ont eu de cesse que de fantasmer sur ce retour à Sion. Puis le rêve prit une allure plus politique, avec la naissance à la fin du 19ème siècle du « sionisme ». Enfin, comme une excuse de la part des Nations coupables, en 1948, le rêve devint réalité, au lendemain d’une des pires périodes qu’ait connue le Peuple Juif. Pour les persécutés, Israël devient une terre d’asile tandis que pour les plus exaltés, elle est synonyme de terre de promesses. Mais alors, le pays où coulent le lait et le miel, où est-il ? Qu’est-il advenu de cet idéal d’égalité et de justice, ce beau poème communiste que devait représenter le kibboutz, aujourd’hui privatisé, et habité par quelques bourgeois et privilégiés en quête de « retour aux sources » ?

Comment créer une société unie et cohérente à partir d’une population provenant de dizaines de pays, avec ses traditions, son histoire, sa langue ? N’oublions pas non plus que dispersé depuis des siècles, le Peuple d’Israël ne bénéficiait en 1948 d’aucune expérience nationale en termes de politique, de relations extérieures ou d’urbanisme par exemple. Là encore, il n’avait que des rêves. Aujourd’hui, à grands coups de gratte-ciels, de centres commerciaux et d’immeubles de luxe, Israël veut se donner des airs d’Amérique, et balaye du même coup les histoires de Tel Aviv, de Haïfa, de Jaffa, passant du grand luxe à la plus profonde misère, dans une indifférence totale.

Quarante pour cent du secteur privé israélien serait entre les mains d’une trentaine de grandes fortunes, dont plus de la moitié seraient étrangères. Là encore, où est-il ce bel espoir d’une société égale, de laquelle ne se détacheraient ni riches, ni pauvres ? Résolu à libéraliser son économie sans autre considération que l’appât du gain et une place sous le soleil des marchés boursiers, Israël néglige ses déshérités, ses mal-logés, ses « indignés » pour mieux s’adonner à la vanité et à l’indécence sous la pression économique, politique et militaire. C’est vrai, Tsahal est indéniablement une des armées populaires les plus remarquables de l’histoire, et ses guerres n’ont pas été étrangères à l’union de la société israélienne, mais est-ce suffisant pour s’en contenter ?

Si la création de l’Etat d’Israël reste une des plus belles réalisations politiques du 20ème siècle, ayant fait sortir de l’exil le Peuple Juif et renaître l’hébreu, pour bon nombre d’israéliens, de Juifs de diaspora même, le désenchantement semble l’avoir définitivement emporté sur l’enthousiasme. Comment interpréter alors ces valorisants sondages hissant Israël aux premiers rangs des nations dans lesquelles le moral de la population est le plus élevé au monde ?

A travers les quelques trois cents pages de cette passionnante étude, l’écrivain et philosophe Ami Bouganim analyse quels facteurs théologiques, politiques, culturels et sociaux pourraient mener à la disparition d’Israël en tant qu’Etat, et à une catastrophe de plus dans l’histoire du Peuple Juif. Si le ton est acerbe, il faut reconnaître que l’on ne pourra refermer ce livre sans se poser certaines questions, voire réviser ses opinions sur ce qu’est aujourd’hui Israël.

Vers la disparition d’Israël ?, d’Ami Bourganim. Editions du Seuil. 310 pages. 17.50€.



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