17 septembre 1394 : L’affaire Denis de Machault, une fausse raison de l’expulsion des Juifs de France

Au printemps 1394, le bruit se répandit que les Juifs de Paris avait fait périr l’un des leurs, nommé Denis de Machault, qui devait se convertir au Christianisme, ou qu’ils l’avaient fait disparaitre pour le forcer à rester dans le Judaïsme.

Le Prévôt de Paris, qui avait fait baptiser les enfants de Denis de Machault en 1393, évoqua cette affaire auprès du roi et fit arrêter sept des principaux Juifs de la Communauté parisienne : Samuel Levi, Belleville de l’Estoile, Abraham de Saonis, Moreau de Laon, Auquin de Boure, Raphaël Abraham et Joseph Dupont Devaux (de Voulx). Ils furent condamnés à être brûlés vifs. Or, la sentence fut jugée trop rigoureuse, le Parlement de Paris commua la sentence des sept Juifs le 6 avril 1394 en condamnation à faire revenir Denis de Machault, à les garder en prison jusqu’à son retour, et pendant ce laps de temps, à être battus « par trois jours de samedy, en
trois différents lieux » : aux Halles, en Place de Grèves, et en la Place Maubert.

Ils furent également condamnés à verser dix mille livres parisis d’amende, dont il en fut « aumosné » cinq cents à l’Hôtel Dieu, et le reste employé « à faire bastir un pont de pierre depuis la Tour ou porte de Petit-Pont jusques à la porte derrière de l’Hostel-Dieu. »

Léon Kahn, dans son livre Les Juifs à Paris depuis le VIème siècle, précise que c’était grâce à l’argent des Juifs que les parisiens devaient la construction – ou la réparation – « du Pont-Neuf, de la Tour de Saint-Cloud (1363), de la Chapelle de Vincennes, et du Petit-Châtelet ». La populace eut raison de l’appui que Charles VI avait accordé aux Juifs et ainsi, cédant aux « grandes plaintes et clameurs », le roi se décida d’exiler définitivement la Nation Juive du Royaume de France. Il leur donna un mois pour
vider les lieux en n’acceptant pas qu’ils fussent molestés ou pillés. Un inventaire des biens des Juifs fut dressé et leurs débiteurs furent obligés de régler leurs dettes sous peine de perdre leur gage.

Escortés par le Prévôt, les Juifs sortirent de Paris le 3 novembre 1394.

Les chefs du judaïsme parisien furent arrêtés en janvier 1395, jugés et condamnés à mort. Leur peine fut ensuite commuée en une amende de 10.000 livres. Benion de Salins fut le premier libéré.

Le 2 mars 1395, il fut défendu à tous les débiteurs des Juifs de leur rien payer. Lorsqu’en mars 1396 le roi annula les créances des juifs, les personnes n’avaient plus de biens négociables, et leur amende fut réduite à 4.000 écus.

Le 30 janvier 1397, ordre fut donné au Prévôt de Paris de brûler et déchirer « tous autant d’obligations faites aux Juifs qu’ils en pourraient trouver ».

Finalement en février 1398, tous les Juifs furent libérés et conduits aux frontières du royaume. Vivant de Montréal ou Moreau de Port étaient
encore en prison en 1397 et le procès de David Levi de Melun courait encore en 1402.

Vers 1397, une collection de rouleaux hébraïques furent découvert et livrés à Gilles Mallet, valet de chambre de Charles VI et administrateur de la librairie du Louvre. Celle-ci se composait de cent quatre-vingt-douze volumes, de quatre rôles et d’un grand nombre de cahiers de la Bible ou du Talmud, tous retrouvés après l’expulsion dans une maison du faubourg Saint-Denis ayant pour enseigne « Au Pourcelet ».

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(disponible prochainement)

Si vous désirez aller plus loin :

Histoire de la communauté israélite de Paris (Éd.1886), de Léon Kahn; aux éditions Hachette / BNF. 139 pages. 11,90€.
Histoire des Juifs de France, d’Esther Benbassa, aux éditions Points. 396 pages. 8,60€.
Chasser les juifs pour régner, de Juliette Sibon, aux éditions Perrin. 304 pages. 21,50€.
Histoire des juifs de France. Tome 1 : des origines à la Shoah, de Philippe Bourdrel, aux éditions Albin Michel. 45 pages. 24,30€.
Histoire des juifs de France. Tome 2 : de la Shoah à nos jours, de Philippe Bourdrel, aux éditions Albin Michel. 454 pages. 24,30€.

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