« Coupable » : Richard Anconina sur les planches du théâtre Marigny pour la première fois

Le major Pascal Zanetti est de permanence au standard téléphonique de Police Secours pour ce qui s’annonce une nuit d’ennui, comme toutes les nuits depuis trois mois qu’il a été suspendu de ses fonctions « sur le terrain ».

Et, comme le lendemain il va passer devant la commission disciplinaire, l’humeur du major Zanetti est encore plus sombre qu’à l’ordinaire de devoir perdre son temps dans ce qu’il estime être « un placard ».

Les appels succèdent aux appels, dérisoires morceaux d’humanité sonore qui disent la peur, la solitude, la détresse, la bêtise. Toute l’angoisse saturée d’un univers nocturne sans grâce ni élégance. Jusqu’à… Jusqu’à cette femme qui paraît souffrir, qui paraît victime, qui paraît donner à Zanetti l’espoir de « servir à quelque chose ou à quelqu’un ».

Tout va s’enchaîner, très vite, au cours d’une expérience théâtrale suffisamment originale pour être intrigante. On assiste à l’entremêlement du monologue mené par Zanetti, ponctué par les irruptions régulières de la collègue de service (qui, elle, a choisi de travailler au standard) et traversé par les interventions sonores, autant d’appels téléphoniques, des plaignants, des témoins, des proches, ou des autres flics.

Cet univers clos est ainsi un chassé-croisé entre l’intériorité coupable de l’individu, les agressions de l’autre (à la fois double gémellaire, opposé et rappels de la hiérarchie) et l’irruption brutale, violente, du monde extérieur : un aquarium traversé par des tsunami !

L’expérience décontenance mais elle est, dans l’ensemble, plutôt convaincante parce que, de façon très maîtrisée, la forme s’accorde au fond, la forme sert le fond, l’épaule, le cadre : la pièce est détonante, palpitante, passionnante.

Elle tient, tout à la fois, du théâtre et du cinéma, d’une sorte de spectacle total, à la fois jeu de comédiens, bruits, lumières, projections, photos, animations et, sans trop chuter dans le sentimentalisme facile, elle maintient une tension quasi permanente tout au long de l’heure et demie.

Le mérite en revient, en grande partie à Richard Anconina, quasiment seul sur scène et, qui plus est, pour la première fois de sa carrière.

Il est là, l’éternel jeune homme du cinéma français qui fit, jadis, pleurer Coluche dans Tchao Pantin et rire Belmondo dans Itinéraire d’un enfant gâté.

Certes, il a pris du poids, des rides et pas mal de cheveux blancs, mais il bénéficie, sur scène comme sur l’écran, de cette bonhomie débonnaire, de ce capital sympathie qui fait qu’on l’écoute, qu’on le suit, qu’on le comprend, et qu’on lui pardonne d’avance. Y compris d’être Coupable.

Coupable, actuellement au théâtre Marigny.

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