« Der tish », une pièce en yiddish d’Ida Fink par le Troïm Teater

Ces dimanche 1er et 8 mars s’est joué à l’Auguste Théâtre la dixième représentation de la pièce Der tisch (« La table » en yiddish), déjà présentée à Paris, mais aussi à Stockhom et à Nancy. Elle se rejouera prochainement à Bruxelles et à Rennes, et un plus grand projet est en cours : la jouer dans le cadre du Festival des Arts de la scène d’Erevan, en Arménie. Aucune date n’a cependant encore été arrêtée.

Dans une bourgade juive polonaise, pendant la guerre, un massacre a eu lieu par la Gestapo et fait 1.200 victimes. Der tish retrace la sélection et « l’action » qui a eu lieu ce jour-là, et convoque quatre rescapés, deux femmes et deux hommes, interrogés par une procureure.

A cette époque et dans ce contexte, le mot « action » avait un sens lié systématiquement à la mort et à la terreur. Chacun y va de sa mémoire personnelle, qu’il juge être infaillible, mais pourtant les contradictions sont bien tangibles, et la procureure, qui dans le texte original est un personnage masculin, cherche à identifier les criminels. Sa tache est lourde là où il ne reste que les mots de chacun et des souvenirs parcellaires.

La mise en scène renforce précisément ce point et met en avant le calme du jeu des cinq comédiens tout en rappelant que l’Histoire se convoque aussi sur des bribes et sur des détails. L’actrice-procureure recueille les paroles avec empathie et sobriété, comme pour pondérer peut-être la folie de ce jour inscrit dans l’Histoire. On sourit parfois devant les contradictions des quatre témoignages, notamment autour de cette fameuse table sur la place du village lors de la sélection. Etait-elle grande et massive ? Ou plutôt petite ? Quelle longueur avait-elle ? L’a-t-on sortie de la mairie ? Quelle distance la séparait de la pharmacie ? Et a-t-elle seulement existé ? Alors pourquoi lui accorder autant d’importance ? Autant de questions posées par la procureure pour mieux dénoncer l’indicible, et constituer de manière quelque peu ludique ce qui ne devrait jamais avoir eu lieu.

On sourit un peu aussi quand un des témoins précise que les deux épiciers se disputaient souvent mais qu’ils se sont retrouvés pourtant dans le même charnier…

C’est le jeu du comédien qui incarne ceci, presque timide mais tellement habité. Sourire pour dépasser l’horreur sans doute.

Les quatre témoins s’accordent tout de même sur un point : c’était une journée ensoleillée et glaciale, et il a neigé. La neige est devenue rouge. Encore un détail probablement. Mais la neige n’est pas une preuve pour les juges dira la Procureure. Alors quelles preuves faudra-t-il apporter pour identifier les criminels là où il ne reste que des morts, et démasquer la bête immonde ?

Pour ce qui est du dispositif scénique, on peut s’interroger sur la présence d’un panneau noir aux lignes blanches suspendu en fond de plateau, représentant les rues de la petite bourgade. Ce dernier n’apporte pas grand-chose à la mise en scène car le jeu des quatre comédiens-témoins, juste et raffiné, appuyé par le calme et la voix douce de la procureure, aurait amplement suffi.

Mais ceci n’est qu’un détail, n’est-ce pas ?

La troupe du Troïm Theater se produira les 2, 3, 4, 5 et 6 décembre 2020 au théâtre de l’Opprimé autour d’une comédie pessimiste, Jacob Jacobson, écrite par Aron Zeitlin.

Der tish, par le Troïm Teater.



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