« HaTufim », la série israélienne qui donna naissance à Homeland…

En Israël, où presque chaque famille compte un soldat dans les rangs de Tsahal, la question de la libération d’otages capturés à l’étranger par des groupes terroristes ou islamistes fait débat, que ce soit sur les bancs des institutions ou au cœur mêmes des foyers.

Le « prix à payer » est souvent remis en cause — et on le comprend — par les familles touchées par des attentats, et qui voient sur les écrans de toutes les chaines du pays les responsables de leur tragédie recouvrer leur liberté et rentrer dans des pays où, comble de l’horreur, ils seront accueillis en héros.

Lorsqu’en octobre 2011, après cinq années de détention dans les geôles des terroristes du Hamas, le soldat franco-israélien Gilad Shalit était libéré, en échange de 1.027 prisonniers palestiniens, dont certains avaient contribué à perpétrer des attentats sanglants sur le territoire israélien, l’épineux sujet s’imposait de nouveau dans une société divisée.

Aussi comprends-t-on mieux le « parcours du combattant » qu’a dû affronter le scénariste et réalisateur Gideon Raff lors de la création de la série dramatique HaTufim.

HaTufim, « les kidnappés », « les enlevés » en hébreu, met donc en lumière cet épisode douloureux de la libération et du retour au pays, en posant l’accent non pas sur ses aspects les plus heureux, mais au contraire sur les difficultés, voire les suspicions qu’implique un tel retour.

Après dix-sept années de détention au Liban, Uri, Nimrod et Amiel sont libérés. Elevés au rang de héros nationaux, Uri et Nimrod reprennent pied dans une société dans laquelle ils n’ont plus aucun repère.

Le pays a évolué, leurs parents sont décédés, leurs enfants ont grandi sans eux et les connaissent à peine, leurs épouses perdent pied face à ces maris qui ne sont plus les mêmes…

De plus, soumis à des analyses psychiatriques par les autorités militaires, des divergences dans leurs récits laissent supposer au Shin Beit, les services de sécurité intérieure d’Israël, qu’ils pourraient détenir des informations essentielles susceptibles de mettre en danger la sécurité de l’Etat hébreu.

Pour en écrire le scénario, Gideon Raff s’est servi de sa propre expérience de l’exil, qui n’est cependant en rien comparable avec celui d’une captivité. 

« Après mon diplôme de cinéma en 1996, confie-t-il, j’ai travaillé comme assistant du réalisateur Doug Liman. Pendant neuf ans, j’ai fait pas mal d’allers-retours entre les États-Unis et Israël, et je me suis rendu compte que ce pays, qui était censé être ma « maison », ne m’était plus si familier. Quand j’ai cherché un sujet ancré dans la réalité d’Israël, le destin des prisonniers de guerre après leur retour au pays s’est imposé.« 

Gideon Raff.

Diffusé en Israël de mars à mai 2010 sur la chaine israélienne Channel 2, les dix épisodes de la saison 1 de HaTufim furent évidemment critiqués, mais bouleversèrent la société israélienne au point de rassembler un audimat jamais atteint par une série dramatique. Les quatorze épisodes de la seconde saison, diffusés quant à eux d’octobre à décembre 2012, et une cascade de récompenses ne feront que confirmer ce succès. La série reçoit en juillet 2010 l’Academy Award de la Meilleure série dramatique, Gideon Raff celui du Meilleur réalisateur, Ishaï Golan, qui interprète Uri, décroche l’Award du Meilleur acteur, et Yaël Abecassis, que l’on a déjà vu dans le très beau Va, vis et deviens, remporte quant à elle celui de la Meilleure actrice pour son rôle de Talia.

Sans cesse à la recherche de nouveaux succès, il n’est pas surprenant que la Twentieth Century Fox, ayant senti le potentiel que représentait HaTufim, en achète très tôt les droits.

Adaptée pour le public américain — Gideon Raff contribuera étroitement à la réalisation mais également à l’écriture du scénario de son premier épisode —, Homeland connaîtra outre-Atlantique le même retentissant succès que sa petite sœur israélienne, avec les mêmes récompenses que celles de la version originale : Meilleure série dramatique, Meilleure actrice pour Claire Danes et Meilleur acteur pour Damian Lewis.

Après BéTipul, qui donnera un nom identique en anglais, In Treatment, et Ramzor, qui donnera Traffic light, les studios américains semblent veiller avec attention sur la désormais très prolifique scène audiovisuelle israélienne.

Hatufim (Prisonniers de guerre), le coffret 3 DVD de la saison 1.

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