« Saint Salopard », le nouveau roman de Barbara Israël

Pour son quatrième roman, Barbara Israël a radicalement changé de registre en évoquant le parcours et la personnalité de Maurice Sachs à travers ce portrait en creux du romancier, né en 1906 et probablement mort en 1945…

Né Ettinghausen, Sachs a opté pour le nom de sa famille maternelle, juive non pratiquante. Après le divorce de ses parents en 1912, il vivra de pensionnat en pensionnat : une enfance solitaire et malheureuse. Sa mère ne l’aime pas et son père l’a complètement abandonné.

Converti au catholicisme, homosexuel, collaborateur, opportuniste, dissolu : c’est ainsi que l’on découvre la vie de cet homme qui a cultivé la haine de soi et le cynisme. Auteur de plusieurs ouvrages, Le SabbatLa chasse à courreAu temps du boeuf sur le toit et Alias, Sachs a également traduit des romans anglo-saxons.

Barbara Israël a opté pour une forme originale avec des lettres imaginaires entre Maurice Sachs et tous ceux qui ont traversé sa vie : ses parents, Violette Leduc, ses amis et amants… Cet échange épistolaire d’outre-tombe éclaire le lecteur sur le personnage de « salaud absolu » mais aussi sur ses relations avec les artistes et mondains de son époque, notamment les écrivains qu’il admirait : André Gide, Jean Cocteau ou encore Max Jacob, entre autres…

Maurice Sachs s’engage en 1942 au STO et collabore avec la Gestapo… C’est pourtant par un S.S. qu’il sera abattu en 1945, à l’âge de 38 ans et après une existence à la fois riche et dissolue (même si un doute subsiste : Julien Green l’aurait vu dans un hôtel trois ans après sa mort présumée).

Bien des années plus tard, son nom apparaît à plusieurs reprises dans l’oeuvre de l’écrivain Patrick Modiano dont la famille a vécu dans le même appartement, au 15 quai Conti à Paris.

Pour la romancière, pas question de dresser un portrait à charge de Sachs : « Nul n’est à l’abri de la médiocrité, ni de la bassesse pas même les écrivains… » confie-t-elle. Elle a souhaité parler de lui à travers les autres sans être prisonnière de la structure romanesque : de fait, cet exercice littéraire – servi par un style élégant et une écriture ciselée – lui a permis de pénétrer l’âme du personnage dans son contexte historique.

A lui seul, le titre de l’ouvrage de Barbara Israël résume parfaitement le paradoxe de ce romancier maudit, de cet être à la fois flamboyant et sulfureux, pitoyable et odieux.

Si la littérature n’a pas retenu son nom comme il l’aurait souhaité, Barbara Israël a relevé le défi en levant le voile sur le mystère Maurice Sachs…

Née en 1970 à Nice, Barbara Israël vit à Paris depuis plusieurs années. Scénariste, réalisatrice de documentaires et romancière, elle déjà publié trois romans, Pop Heart en 2007, Miss Saturne en 2009 et Nos vies rêvées en 2010.

Patricia DRAI pour Cultures J. com.

Saint Salopard, de Barbara Israël, aux éditions Flammarion. 208 pages. 18,00€.

Si vous désirez aller plus loin :

Nos vies rêvées, de Barbara Israël, aux éditions 10×18. 336 pages. 8,10€.
Disneyland : Nouvelles, de Barbara Israël et Ariel Kenig, aux éditions Flammarion. 160 pages. 17,30€.

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