« Une famille juive du temps de l’Exode », d’Anny Bloch

Docteur en sciences sociales, Anny Bloch est socio-anthropologue au CNRS. Spécialiste des migrations transatlantiques et des judaïsmes, elle a participé à la fondation de la revue Diasporas, Histoire et sociétés et a écrit de nombreux articles et publié plusieurs ouvrages.

Juin 1940. L’invasion allemande et la crainte de voir son véhicule réquisitionné incitent la famille d’Anny Bloch – famille juive alsacienne et patriote – à prendre la route. A l’instar de nombreuses familles, les Dockès quittent donc  leur ville de Remiremont dans les Vosges pour rejoindre le sud, encore préservé.

Yvonne a 20 ans, elle rejoint Nîmes avec ses parents, Armand et Juliette Dockès. La famille fera halte dans un petit village de Haute Loire, Saugues, où elle vivra durant quatre mois, de juin à octobre 1940.

Cette parenthèse se révélera déterminante pour les Dockès et c’est précisément ce que nous raconte Anny Bloch, fille d’Yvonne, petite-fille d’Armand et Juliette, dans cet ouvrage original composé de plusieurs parties :

  • la première consacrée à la vie de la famille accueillie et protégée par des familles chrétiennes dans ce petit bourg de montagne, et notamment la logeuse Marie Roux-Aldon.
  • suit une réflexion sur la cuisine de guerre et la cuisine juive,
  • enfin, l’auteur nous dévoile une cinquantaine de recettes sur les 150 écrites en 1940 dans un petit carnet par sa mère, Yvonne : des recettes de plats alsaciens et lorrains, des créations plus ou moins élaborées mais toutes constituent le patrimoine de la famille.
  • un carnet de photographies et un arbre généalogique complètent l’ouvrage et donnent vie à cette famille meurtrie par la guerre et l’histoire.

La cuisine demeure – ô combien ! – un « matrimoine vivant, un art de faire, un héritage transmis cahin-caha par nos mères, nos grands-mères ; il est vrai un matrimoine un peu particulier : il se hume, il se goûte, il se sent  et il se voit ».

En retournant sur les traces de sa famille et en menant une enquête minutieuse, Anny Bloch a remonté le temps et nous transmet une histoire dans laquelle de nombreuses familles pourront se retrouver, comme celle de Serge Klarsfeld qui, dans une belle introduction à l’ouvrage d’Anny Bloch, relève les nombreuses similitudes des destins de leurs deux familles.

« Langues et cuisine  forment un lien constant, un grenier à souvenirs » écrit  très justement l’auteur.

L’activité professionnelle d’Anny Bloch lui a permis de voyager durant de nombreuses années et aujourd’hui, elle poursuit ses recherches sur les raisons de la survie des familles juives malgré les guerres, exils et spoliations qui ont – hélas – jalonné leur histoire millénaire.

Patricia DRAI pour Cultures J. com.

Une famille juive du temps de l’Exode, d’Anny Bloch, aux éditions Michel Houdiard. 120 pages. 20,00€.

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