La lumière est faible, le sol jonché d’accessoires et de boîtes de carton répondant aux interminables armoires d’archives en fond de scène. Un univers qui a dû être, des mois durant, celui de Camille Vallet, étudiante qui vient d’achever sa thèse sur Simone Veil.
Au cours d’une émission de radio, Camille est invitée à s’exprimer sur les raisons de son choix, et à revenir sur la vie et la carrière de l’une des plus grandes figures féminines françaises. Pour elle, le choix de Simone Veil était une évidence, tant elle est une éternelle source d’inspiration.
Mais au fil des questions, ce n’est bientôt plus la jeune femme qui s’exprime, mais Simone Veil elle-même. Elle répond, elle corrige, elle s’emporte parfois, enrichissant les propos dans un probable désir d’exactitude. Il est vrai que depuis son entrée sur la scène publique, il y a de cela cinquante ans, bien des choses ont été dites et écrites sur elle. Pas toujours vraies, pas toujours avenantes. Loin de là…
Durant une heure quinze, avec Camille et Simone, le spectateur replonge dans neuf décennies d’Histoire, la grande et la petite : l’enfance à Nice, l’arrestation et la déportation à Auschwitz, les marches de la mort, le retour en France, la magistrature, l’arrivée au Gouvernement de Valéry Giscard d’Estaing et la fameuse loi sur l’IVG, la présidence de l’Europe, la reconnaissance par Jacques Chirac de la responsabilité de la France dans la Shoah, sans oublier le travail de Mémoire qu’elle fera sien jusqu’à son dernier souffle…
Alors que la sortie du film Simone. Le voyage d’une vie, d’Olivier Dahan, est annoncée début 2022, la vie de Simone Veil est pour la première fois portée sur les planches dans Les combats d’une effrontée.
Mis en scène par Pauline Susini sur une adaptation d’Antoine Mory et Cristiana Reali, c’est cette dernière qui endosse le rôle principal, avec une ressemblance et une aisance surprenantes. Gestuelle, coiffure, chemisier, tailleur et sac Chanel, collier de perles, et accessoirement cigarettes et coupe à Champagne, l’illusion est parfaite !
« L’adaptation au théâtre des mémoires de Simone Veil, « Une vie », pose avant tout la question de l’écriture dramatique. Dramatique, la vie de Simone Veil l’est indéniablement, parce qu’elle repose sur une myriade d’événements susceptibles de faire basculer un destin. Représenter cette vie au théâtre suppose de rester fidèle à ce que furent les événements, leur enchaînement et leur portée.«
Cristiana Reali et Antoine Mory.
Quant à la mise en scène, subtile et enrichie de projections et d’extraits audio, elle permet, sans aucune modification du décor, de passer d’une salle d’archives à des baraquements d’Europe de l’Est, d’une station de radio à une salle de meeting politique.
« […] J’ai souhaité interroger les frontières entre le réalisme documentaire du texte, qui retrace la vie de Simone Veil, et les possibilités fictionnelles ouvertes par son imaginaire et son espace mental. Délestés de tout artifice superflu, les éléments scénographiques ont vocation à façonner cet univers ambigu, fait de clair-obscur. Plus que des ornements, le son, la lumière et la vidéo forment la véritable structure du l’espace. »
Pauline Susini.
Malgré la complexité de cet ambitieux projet, le public, conquis, est debout pour saluer la performance. Au théâtre Antoine, Simone Veil est vivante.
Simone Veil. Les combats d’une effrontée, actuellement et jusqu’au 30 décembre 2022 au Théâtre Antoine.
Si vous désirez aller plus loin :
Une vie, de Simone Veil, aux éditions Livre de Poche. 352 pages. 7,90€.
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