Les diplomates : ce sont ces gens que l’on connait mal tant tout en eux parait quelque peu occulte, de leur formation à leur fonction, en passant par leur recrutement.
Tous n’ont pas le même rôle : si l’Ambassadeur représente son pays et s’efforce d’en traduire les orientations géopolitiques, le consul, lui, gère ses compatriotes à l’étranger de façon plus pratique et technique.
Au moment où débute la Seconde guerre mondiale, les diplomates sont nettement moins nombreux qu’aujourd’hui : à peine seize ambassadeurs couvrant les seules nations considérées alors comme majeures.
Tous, bien sûr, exercent à l’étranger et, au sujet d’un événement aussi monstrueux et tragique que la Shoah, on peut se poser des questions essentielles : que savaient-ils, ces diplomates ? Que pouvaient-ils savoir ? Que pouvaient-ils faire ? Qu’ont-ils fait, concrètement ?
D’emblée, il faut l’avouer, leur marge de manœuvre parait limitée. Le diplomate représente son pays et la politique de son pays, il n’en est pas juge.
Il n’a pas pour charge de compenser les failles et les faiblesses éventuelles de son gouvernement mais, au contraire même, de les assumer. Nombreux sont ceux que le régime de Vichy, sous divers prétextes, va remplacer, placer d’office à la retraite — tel Paul Morand — ou bien neutraliser en les nommant à des postes insignifiants.
Et puis, vis-à-vis de la Shoah et de l’idéologie nazie, il faut bien reconnaitre que dans les rangs des diplomates — comme d’ailleurs dans bien des secteurs dirigeants de l’Europe — règne alors un insidieux mais certain antisémitisme.
De façon très générale, devant les premiers soupçons d’une répression nazie, le monde entier éprouve un malaise et une répugnance à intervenir.
Lorsqu’en mars 1938, l’Anschluss provoque une émigration juive massive et que, en particulier, 200.000 juifs autrichiens quittent leur pays, le Président américain Roosevelt ne voit pas d’autre alternative que de provoquer une grande réunion inter-étatique pour discuter du sort de ceux que l’on nomme poliment « émigrants volontaires » afin de ne pas vexer Hitler en les qualifiant de « réfugiés ».
La réunion aura lieu à Evian parce que Genève a refusé de l’accueillir et, en ce mois de juillet 1938, les trente-deux états présents se refuseront à accueillir des juifs sauf, éventuellement, des agriculteurs. Mais il n’y en avait pas parmi les réfugiés. Golda Meir, qui assistait à la conférence en tant que représentante de la Palestine, dira éprouver « un mélange de douleur, de rage, de frustration et d’horreur ».
L’exposition ne laisse aucun doute sur les éléments d’information dont pouvaient disposer les diplomates.
Grâce aux témoignages divers, grâce aux quelques journalistes qui enquêtaient, grâce aux rescapés, les diplomates étaient très bien placés pour savoir. Et certains d’ailleurs, très tôt, tel Jacques Truelle, alertent le gouvernement de Vichy des exactions qui ont lieu en Europe de l’Est et des dangers que courent les populations juives. D’autres, au contraire, tel Jean Dobler, ne feront preuve que de zèle pour collaborer avec les nazis.
Heureusement que certains diplomates firent preuve d’une lucidité et d’un courage admirables : François de Vial, attaché à l’Ambassade de France auprès du Saint-Siège de 1940 à 1944, sauva de nombreux juifs en leur donnant refuge au sein même de ses locaux.
Il a été nommé Juste parmi les Nations en juillet 2020.
Les diplomates face à la Shoah, jusqu’au 8 mai 2022 au Mémorial de la Shoah.
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