Après deux années de travaux colossaux, le magnifique Palais Galliera, dans le 16ème arrondissement, rouvre enfin ses portes avec un premier grand rendez-vous pour cet hiver 2020. Et quel rendez-vous !
Il fallait bien un écrin majestueux majestueux, un palais entièrement rénové et le doublement des surfaces d’exposition pour accueillir Gabrielle Chanel, manifeste de mode, à qui sont consacrés les deux niveaux et désormais 1.500 m2 du bâtiment. Organisée en collaboration avec de nombreuses institutions françaises et internationales et prêteurs privés, cette exposition est la toute première consacrée à Chanel à Paris.
Issue d’une milieu modeste, Gabrielle Chanel passera sa vie non pas à « livrer un combat contre la mode », mais plutôt à tenter d’offrir aux femmes — et à celles du début du 20ème siècle notamment — la possibilité de se débarrasser du pesant carcan vestimentaire qui les entoure. La couturière veut une nouvelle forme d’élégance, pratique et sportive. En cela, elle rejoint dans l’esprit le fameux Form follows function, maxime attribué à l’architecte Louis Sullivan et si chère à l’école du Bauhaus.
Et lorsque l’on est à la tête d’un train en marche, prêt à bousculer un secteur jusque-là exclusivement masculin, quel meilleur ambassadeur que soi-même pour convaincre ? Chanel portera donc… du Chanel !
“Avant d’être une marque, Chanel fut une aventurière.”
Lilou Marquand.
De ses toutes premières créations avec des tissus simples comme le tweed ou le jersey jusqu’à « la petite robe noire » et les tenues de soirée dont l’élégance n’a d’égal que la sobriété, Gabrielle Chanel, manifeste de mode se parcourt comme une histoire, de 1910 où elle s’offre sa première boutique au 21 rue Cambon jusqu’à la fin des années 60, en passant par la création dans l’entre-deux guerres de sa propre usine de textiles, qu’elle crée à la fois pour plus d’originalité dans ses créations, mais aussi pour disposer d’une offre de tissus exclusive.
Une très belle salle est exclusivement dévolue au fameux parfum N°5 — il fallait bien ça —, savant mélange de quelques quatre-vingt composants conçu par Ernest Beaux, et pour lequel Gabrielle Chanel va s’associer en 1924 aux frères Wertheimer, juifs alsaciens. Un parfum aujourd’hui entré dans la légende, grâce notamment une autre légende, d’Hollywood celle-ci : Marilyn Monroe.
« Vous savez, on me pose des questions… Par exemple : Que portez-vous pour dormir ? Un pyjama, un bas de pyjama ? Une chemise de nuit ? Alors, j’ai répondu ‘Chanel N°5’. Parce que c’est la vérité. Vous comprenez, je ne vais pas dire ‘nue’ ! »
Marilyn Monroe au micro du magazine Marie Claire, 1960.
Au sous-sol, dans les vastes et nouveaux espaces ouverts au public, le visiteur découvrira également rassemblés quantité de bijoux et d’accessoires, que Chanel se faisait un plaisir d’utiliser parfois jusqu’à l’excès, violent et très chic contraste avec la sobriété de ses tenues. Une salle aux allures de coffre-fort où des vitrines brillant de mille feux se succèdent, et au sein desquelles la fantaisie historique côtoie sans embarras la haute-joaillerie florale ou exotique lancée en 1932.
Une réouverture du Palais Galliera toute en élégance donc…
On se réjouira enfin de constater que cette superbe exposition s’atèle uniquement à présenter l’oeuvre de la couturière, et n’évoque en aucun cas les aspects sombres d’une vie privée qui plongèrent la femme — et non l’artiste — dans l’ombre jusqu’en 1954, date de la réouverture de la Maison. A une heure où la vie privée des personnalités publiques l’emporte sur leur travail à des seules fins médiatiques, il est bon de savoir encore faire la part des choses.
Gabrielle Chanel, manifeste de mode, jusqu’au 18 juillet 2021 au Palais Galliera.
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