« Aryennes d’honneur » : des mondanités de l’aristocratie à la menace des camps…

« Aryennes d’honneur ». Voilà un titre pour le moins étrange… Avec ce premier roman, Damien Roger nous replonge dans l’Histoire, et dans celle de ce statut si particulier détenu par une poignée de femmes durant l’Occupation.

Abraham-Jacob Stern, originaire de Francfort, cité d’échanges et de finances, arrive en France au début des années 1830, et y fonde une banque comparable à celle des Rothschild. Pour des raisons d’intégration, et comme tant d’autres avant lui, à Paris Abraham-Jacob devient Antoine-Jacques. Quelques années plus tard, son fils, Louis, épouse dans la synagogue du Ghetto Nuovo de Venise la jeune et jolie Ernesta Hierschel de Minerbi, avec qui il aura trois filles.

C’est donc à une histoire de famille à laquelle nous convie Damien Roger dans Aryennes d’honneur

Parmi les trois filles du couple Stern – Hierschel de Minerbi, deux vont contracter des unions prestigieuses avec le « sang bleu » de France : l’aînée, Marie-Louise, épouse en 1900 Louis de Chasseloup-Laubat, et devient par la même occasion marquise ; puis Lucie quelques années plus tard, qui elle devient baronne après avoir convoler en justes noces avec Pierre Girot de Langlade. 

N’oublions pas non plus leur cousine, Suzanne, devenue comtesse Sauvan d’Aramon. Son époux, Bertrand, proche du régime de Vichy, sera l’un des 569 parlementaires à voter les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain.

Probablement ne sait-il pas encore le risque qu’il fait courir aux juifs de France, et plus particulièrement à son épouse et à sa famille.

Et que dire de Marie-Louise ? N’est-elle pas l’une des meilleures amies de « la maréchale », Madame Annie Pétain ? N’a-t-elle pas assisté, sitôt passés les très controversés Jeux Olympiques de 1936, à des inaugurations officielles à Berlin ? C’est d’ailleurs là qu’elle va mesurer toute la menace qui pèse sur son Peuple : la croix gammée flotte partout, à chaque coin de rue, aux façades de chaque bâtiment ; mais sous ses aspects « proprets », temporairement nettoyée de ses signes de persécutions et d’antisémitisme, l’Allemagne nazie ne la trompe pas.

N’oublions pas non plus la marquise de Brinon, née Rachel Franck, épouse de l’ambassadeur de Philippe Pétain en France occupée.

Mais il est déjà trop tard !

Comme un thriller, entrecoupé de notes d’investigations, Aryennes d’honneur embarque le lecteur dans une histoire passionnante, souvent connue des seuls historiens. Si d’apparence ce statut privilégié d’aryenne d’honneur les mettait à l’abri de menaces et d’arrestations, le destin de ces quelques femmes, souvent issues d’une finance juive abhorrée par les nazis, allait cependant être marqué de l’empreinte de Drancy et d’Auschwitz…

Une plongée passionnante dans les arcanes d’un pouvoir qui sut habilement conjuguer impératifs diplomatiques et intérêts personnels.

Aryennes d’honneur, de Damien Roger, aux éditions Privat. 368 pages. 22,90€.

Si vous désirez aller plus loin :

L’État contre les juifs. Vichy, les nazis et la persécution antisémite, de Laurent Joly, aux éditions Flammarion. 384 pages. 10,00€.
Dénoncer les Juifs sous l’Occupation, de Laurent Joly, aux éditions CNRS. 240 pages. 10,00€.
Fernand de Brinon, l’aristocrate de la collaboration, de Gilbert Joseph, aux éditions Albin Michel. 652 pages. 26,40€.

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4 commentaires sur « Aryennes d’honneur » : des mondanités de l’aristocratie à la menace des camps…

  1. Exceptionnel… émouvant et terrible ! A lire impérativement pour mieux comprendre l’âme humaine et ses tréfonds lorsque les Hommes sont faces à leur destin.

  2. merci, bravo, je viens de lire ce roman sorti juste ce 16 février
    c’est remarquable, émouvant et tellement important pour… …. savoir
    donc à mettre dans toutes les mains surtout à des gens comme moi… qui sont « goys

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