A la fin du 19ème siècle, les femmes collectionneuses d’art sont déjà nombreuses, mais méconnues. Elles ne fréquentent pas les musées et les galeries au même moment que les hommes.
Les profonds bouleversements que connaîtront les pays occidentaux depuis le 19ème siècle jusqu’aux années 70 redistribueront les cartes. Décennie après décennies, les femmes gagnent en indépendance, accèdent à la propriété, à l’existence juridique et se libèrent de l’assujettissement paternel ou marital. Elles travaillent, gèrent elle-même des fortunes desquelles elles n’héritent plus forcément, mais qu’elles créent par leur travail, au même titre que les hommes.
Entre 1905 et 1930, ce que l’on appelle communément la « Belle Epoque » et les « Années Folles », la femme s’émancipe, sexuellement et intellectuellement. Cette période est également un tournant décisif dans le choix de leurs œuvres, l’art ancien, italien principalement, cédant la place à l’avant-garde.
Un grand nombre de musées qui furent créés entre la fin du 19ème et le milieu du 20ème siècle le furent d’ailleurs sous l’impulsion de femmes, comme ce fut le cas entre autre pour le MoMA en 1929, le Whitney le 1931 ou encore le Non-Objective Painting en 1939.
Dans son superbe ouvrage Femmes mécènes et collectionneuses d’art, publié aux éditions Hazan, Julie Verlaine invite le lecteur et l’amateur d’art à un voyage à travers l’histoire des plus fameuses collections féminines de 1880 à nos jours.
Au fil des pages, on croise des noms tous plus célèbres les uns que les autres : Nelie Jacquemard, exemple de l’ascension sociale par l’art et l’une des rares collectionneuses françaises dont le musée porte encore le nom ; Louise Avemeyer, qui fit découvrir l’impressionnisme aux américains ; Agnès b., créatrice de mode qui ouvre la Galerie du Jour dans la rue du même nom…
Dans les premières années du 20ème siècle, Gertrude Stein, qui tient salon à Paris rue de Fleurus et rue Madame, verra sa vocation profondément bouleversée suite à sa rencontre avec Pablo Picasso — à qui elle assurera un achat régulier de toiles —, et qui réalisera d’elle un fameux portrait aujourd’hui conservé au Metropolitan Museum.
A l’inverse de la collection des Stein, celle d’Helena Rubinstein n’a rien d’exceptionnelle. Si elle s’illustre, c’est par le fait que c’est la première collection féminine acquise par le fruit du travail de sa propriétaire, et non plus, comme c’était le cas jusqu’alors, par un héritage. A la tête d’un empire, Helena Rubinstein possède également un pavillon à son nom au centre culturel de Tel Aviv.
Peggy Guggenheim, fille de Benjamin Guggenheim, mort en 1912 lors du naufrage du Titanic, et de Florette Seligman — deux des familles les plus puissantes des Etats-Unis —, passera de nombreuses années à parcourir le monde et deviendra mécène pour ses amies, la poétesse anglaise Mina Loy, ou Bérénice Abbott, à qui elle offrira son premier appareil photo.
Elle débutera sa collection en achetant une toile dans chaque exposition qu’elle visite, en guise de compensation pour l’artiste. Ce sera souvent la seule toile vendue.
Il ne s’agit-là que de quelques exemples, Femmes mécènes et collectionneuses d’art revenant également sur les collections d’Alexandra et Dagmar de Danemark, Isabelle Stewart Gardner, Hélène Kröller-Müller, Marie-Laure de Noailles, Gabrielle Keiller, Jacqueline Delubac, les sœurs Schlumberger, Ingvild Goetz, Tatiana Kolodzei ou encore Patrizia Sandretto de Rebaudengo…
Superbe et passionnant, cet ouvrage richement illustré replace les sujet dans leurs contextes politiques et historiques, et est également fortement documenté par le recourt aux documents d’archives.
Femmes collectionneuses d’art et mécènes, de 1880 à nos jours, de Julie Verlaine, aux éditions Hazan. 288 pages. 35,00€.
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