« Franz Marc/August Macke. L’aventure du Cavalier Bleu », au Musée de l’Orangerie

Actuellement et jusqu’au 19 juin, dans le cadre de sa programmation autour des Avant-gardes européennes, le Musée de l’Orangerie accueille une superbe exposition, véritable feu d’artifice de formes et de couleurs, consacrée à deux artistes majeurs de l’expressionnisme allemand et fondateurs du Cavalier Bleu, « Der Blaue Reiter » : Franz Marc et August Macke.

Première présentation monographique en France de ces deux artistes, ce sont une centaine d’œuvres de musées internationaux et de collections particulières qui sont exposées sur les cimaises du musée du Jardin des Tuileries, pour la plupart jamais montrées à Paris, et qui permettent de revenir sur les parcours aussi brefs qu’uniques de ces deux destins tragiques.

Lié par une profonde amitié, Franc Marc et August Macke se rencontrent à Munich en 1910, lors de l’exposition consacrée au peintre Henri Matisse à la galerie d’Heinrich Tannhauser. Au même titre que Matisse, d’autres artistes français tels que Paul Gauguin, Vincent Van Gogh ou Paul Cézanne auront sur les deux artistes allemands une influence considérable, que ce soit pour la nature, le paysage, ou encore le monde animal, dont Franz Marc fera son thème de prédilection.

La naissance du fauvisme et du cubisme, et la rencontre d’August Macke avec Vassily Kandinsky, dont la toile Composition V a été rejetée par le comité organisateur de l’exposition de 1911 de la Nouvelle Association des Artistes Munichois, sera décisive. Opposés à l’art bourgeois, ils vont créer ensemble un collectif d’artistes, le Cavalier Bleu – Macke abandonnant dans le même temps la peinture de plein-air -, et se lancer dans l’édition d’un Almanach entièrement rédigé par des artistes, et visant à tisser des liens entre les différentes formes d’art et à mettre en lumière de nouvelles idées progressistes.

« Nous nous étions, Marc et moi, jetés sur la peinture, mais la peinture seule ne nous suffisait pas. Ensuite j’eus l’idée d’un livre synthétique qui effacerait les vues courtes et périmées, ferait tomber les murs entre les arts… et démontrerait finalement que la question de l’art n’est pas une question de forme, mais de contenu artistique. »

Wassily Kandinsky.

Si le nom de Cavalier Bleu est le nom d’un tableau de Kandinsky datant de 1903, la symbolique du cavalier et des chevaux renvoient également à un désir de liberté artistique, tandis que le bleu, couleur de la spiritualité, s’oppose au rouge, couleur de la violence.

« Nous avons trouvé le nom de Cavalier Bleu – ‘Blaue Reiter’ – en prenant le café […] ; nous aimions tous les deux le bleu, Marc les chevaux, moi les cavaliers. »

Wassily Kandinsky.

En 1911 et 1912, à Munich, le Cavalier Bleu organise deux expositions nommées Exposition du comité éditorial du Cavalier Bleu. La première, qui regroupe 54 œuvres de 14 artistes, se tient du 18 décembre 1911 au 1er janvier 1912 à la galerie Tannhauser, la seconde du 12 février au 18 mars 1912 à la galerie Hanz Goltz, montrant quant à elle quelques 315 œuvres graphiques.

Lors de ces expositions, les visiteurs peuvent découvrir des toiles du Douanier Rousseau – qui occupe une place particulière pour le collectif d’artistes et qui sera très présent dans les pages de l’Almanach -, André Derain, Paul Klee, Pablo Picasso, Arnold Schönberg ou encore Robert Delaunay, dont Franz Marc et August Macke visiteront l’atelier parisien en 1912, et à qui un texte est dédié dans l’Almanach. Ces deux expositions du Cavalier Bleu marquent un point historique pour la percée de l’art moderne en Allemagne.

Ensemble, ils organiseront également des expositions internationales, dont le Salon d’automne de Berlin en 1913. Mais, comme un pressentiment d’inquiétude à peine voilé dans une Europe qui s’apprête à plonger dans son premier conflit mondial, c’est également à cette époque que le travail de Franz Marc va évoluer. Après sa rencontre avec Delaunay et la découverte du Futurisme, la douceur et la souplesse des traits tendent de plus en plus vers des lignes acérées et agressives, les paisibles animaux cédant la place à des prédateurs, à l’image des Loups, chef-d’oeuvre peint en 1913.

Petit à petit, August Macke s’éloigne du Cavalier Bleu, se réfugie en Suisse, et entreprend avec son ami Paul Klee un voyage en Tunisie où la lumière et les couleurs de la Méditerranée vont lui inspirer de magnifiques tableaux et aquarelles, comme Kairouan III ou La marchande de cruches, tous deux de 1914. La majeure partie de ses œuvres abstraites datent également de cette époque.

A l’été 1914, suite à l’assassinat à Sarajevo de l’archiduc François-Ferdinand, l’Europe entre en guerre. Comme des millions d’allemands, August Macke prends les armes et est incorporé dans le 9ème régiment d’infanterie rhénan, Franz Marc dans le 1er régiment. Envoyé sur le front français, August Macke est tué le 26 septembre à l’âge de 27 ans. Franz Marc sera quant à lui tué à Verdun le 4 mars 1916.

Au travers du Bauhaus, où Wassily Kandinsky enseigne à partir de 1912, l’esprit du Blaue Reiter et de ses principaux fondateurs continuera cependant d’exister.

Franz Marc / August Macke. L’aventure du Cavalier Bleu, au Musée de l’Orangerie du 6 mars au 17 juin 2019.

Si vous désirez aller plus loin :

Franz Marc/August Macke, l’aventure du Cavalier Bleu, le catalogue de l’exposition, aux éditions Hazan. 192 pages. 39,95€.
Franz Marc et August Macke, le hors-série aux éditions Connaissance des Arts. 9,50€.
Le Cavalier Bleu, de Hajo Duchting aux éditions Taschen. 96 pages. 10,00€.
L’Almanach du Blaue Reiter : le Cavalier bleu, de Wassily Kandinsky et Franz Marc, aux éditions Klincksieck. 355 pages. 35,00€.

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