Helen Mirren. Deux mots qui sont entrés dans la légende du cinéma voilà presque dix ans.
En 2006, la comédienne anglaise interprétait l’un des rôles les plus casse-gueule de l’histoire du cinéma : Elizabeth II. Avant cela, Mirren s’était déjà bâtie une solide réputation parmi les amateurs de théâtre, ayant interprété sur scène les plus grands rôles du répertoire, puis à la télévision, aussi bien au Royaume-Uni qu’aux Etats Unis. Incontournable Jane Tennison dans la série anglaise Prime Suspect, Helen Mirren a su profiter de cette notoriété pour traverser l’atlantique et interpréter une grande variété de personnages dans des téléfilms prestigieux comme Losing Chase qui lui vaut son premier Golden Globe. The Passion of Ayn Rand, dans lequel elle interprète l’auteure juive américaine, lui vaut son premier Emmy Award et la consacre comme l’une des personnalités les plus respectées de la télévision américaine.
Au cinéma, Helen Mirren gagne ses galons auprès de la critique mais reste une actrice discrète, même si le grand écran lui offre un premier rôle de prestige dans Excalibur de John Boorman en 1982, avant que le jury du festival de Cannes lui décerne en 1984 le prix d’interprétation pour Cal, puis pour La Folie du Roi Georges dix ans plus tard. Ce superbe film en costume lui apporte également une première nomination aux Oscars qui coïncide avec les premiers pas de Prime Suspect à la télé américaine. Un rôle de méchante dans un film pour ados (Mrs Tingle, 1999) et quelques seconds rôles remarqués (dont Mrs Wilson dans Gosford Park de Robert Altman) plus tard, Helen Mirren est prête à prendre sa revanche en devenant, à presque soixante ans, une star internationale.
Le succès mondial de la comédie british Calendar Girls est la rampe de lancement idéale vers son futur rôle « signature » de The Queen. Couplé avec les diffusions successives de la mini-série Elizabeth I où elle interprète à nouveau une monarque légendaire, et le dernier volet de Prime Suspect, le film de Stephen Frears permet à son actrice de finir l’année 2006 avec un Oscar, deux Golden Globes, deux SAG Awards, le prix d’interprétation à Venise et un BAFTA. Contrairement aux acteurs couronnés tardivement plus pour leur carrière que pour un rôle en particulier, et qui peinent ensuite à poursuivre sur leur lancée (on pense notamment à Mickey Rourke dans The Wrestler), Helen Mirren ouvre une nouvelle page et se lance à l’assaut de Hollywood avec un flair qui ferait pâlir plus d’une starlette.
Régulièrement applaudie lors d’apparitions toujours très classe sur les tapis rouges, l’actrice s’est forgé une réputation d’icône fashion dont elle semble être la première surprise, mais qui lui permet d’être souvent nommée à des prix pour le simple plaisir de sa présence sur le « red carpet » : plus grand monde ne se souvient des biopics Hitchcock ou The Last Station, qui n’ont pas vraiment enflammé le box-office mais ont valu à Helen Mirren des citations aux Oscars, aux Golden Globes et aux SAG Awards souvent au détriment d’actrices plus jeunes, un fait suffisamment rare pour être souligné. En rejoignant le casting du film d’action RED, qui cartonne dans le monde entier, l’actrice achève de prouver qu’elle est non seulement incontournable mais furieusement tendance.
Depuis 2010, année de ses soixante-cinq ans, Helen Mirren a ajouté une nouvelle corde à son arc et confirme un plan de carrière très intelligent en attirant dans les salles obscures un public souvent négligé ou plus courtisé à la télévision : la femme d’âge mur américaine. En interprétant le rôle-titre de L’Affaire Rachel Singer, qui suit le combat d’une ex-agent du Mossad pour retrouver la trace d’un criminel nazi après plusieurs décennies de mensonge, Helen Mirren permet à ce remake d’un thriller israélien assez méconnu de passer la barre des 30 millions de dollars. Cinq ans plus tard, avec une notoriété au beau fixe, après avoir créé la surprise en emmenant le « feel-good movie » Les Recettes du Bonheur au-delà des 50 millions (soit plus de deux fois son budget) rien qu’aux Etats Unis, revoilà l’actrice en tête d’affiche d’un projet difficile à monter, La Femme au Tableau, co-production anglo-américaine sur une femme juive essayant de récupérer l’héritage de sa famille, spolié par les nazis.
Comme pour ses précédents films, produits pour relativement peu d’argent, La Femme au Tableau a fait le parcours inverse, et d’autant plus valorisant, de la plupart des blockbusters hollywoodiens : peu de pub, peu d’écrans, des débuts en douceur, puis du bouche à oreille, qui permet d’engranger des recettes de plus en plus conséquentes. A l’heure qu’il est, à quelques jours de sa sortie en France, La Femme au Tableau a cumulé plus de 30 millions de dollars aux Etats Unis, et le plus surprenant est que la presse n’a pas été tendre avec le film, jugeant à juste titre qu’Helen Mirren, impériale comme toujours, est la seule vraie raison de voir ce mélange maladroit mais sincère de drame historique et de thriller judiciaire. Une garantie qui a suffi au public pour se déplacer au cinéma.
Quand la notoriété permet d’éveiller les esprits et de rafraichir les mémoires sur des sujets toujours sensibles, il n’y a plus qu’à applaudir.
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