Après Maggie Smith à Londres, Judith Magre incarne Brunhilde Pomsel dans « Une vie allemande »

Connaissez-vous Brunhilde Pomsel ? Peut-être pas. Et Joseph Goebbels ? Oui, bien sûr ! Le ministre de la propagande nazi est aussi tristement entré dans l’Histoire que le furent ses complices du IIIème Reich.

De 1942 à 1945, Brunhilde Pomsel fut l’une des six secrétaires particulières de Joseph Goebbels. Elle a côtoyé l’horreur et le mal au plus près, sans pour autant se souvenir avec précision de ces trois années. Du moins, c’est qu’elle prétend.

Trente heures d’entretien avaient ensuite donné lieu à Une vie allemande, un film-documentaire de deux heures présenté en 2016 au Festival du Film de Munich, ville dans laquelle elle vivait. Une vie allemande passe donc pour une biographie, mais basée exclusivement sur les propres souvenirs de sa narratrice. Difficile dans ces cas-là de se faire une opinion sur l’exactitude de ses propos, habilement placés entre besoin de se dévoiler et volonté de convaincre. 

Elle le dit elle-même, elle ne se souvient pas de grand-chose. Il peut sembler surprenant d’avoir “oublié” trois années parmi les plus sombres de l’histoire contemporaine, au cœur de la machine nazie, alors que dans le même temps elle se montre très loquace et claire sur des événements survenus dans les années 20.

« C’était important pour moi de reconnaître cette image dans le miroir, dans laquelle je peux comprendre ce que j’ai fait de mal. […] Il ne s’agit absolument pas de soulager ma conscience. »

Brunhilde Pomsel.

Tiens, puisque nous sommes au cœur du sujet, que se passait-il dans les arcanes du pouvoir à ce moment-là, à Berlin en 1942-1942 ? En tant que secrétaire particulière de Goebbels, elle a bien dû entendre quelque chose, ou voir passer certains documents sur son bureau ?

Non, vraiment, elle ne s’en souvient pas. Même pas d’avoir entendu parler d’Hans et de Sophie Scholl, condamnés à mort pour avoir distribué des tracts.

« Ai-je fait quelque chose de mal ? Dois-je me sentir coupable ? » interroge-t-elle enfin, prenant le public pour témoin.

« Il y a quelque chose de formidable avec Une vie allemande : on est sans arrêt sur un fil. À quel moment cette femme ment ? A quel moment dit-elle la vérité ? Je n’aime pas le théâtre qui prêche, qui ne va que dans une seule direction. Je veux que les spectateurs soient partagés. On a vite tendance à penser que les gens comme Brunhilde Pomsel sont des monstres ; cette dame a été au cœur de la machine de l’horreur. Ce serait très facile de juger aujourd’hui, de dire que l’on aurait agit autrement. Le texte vient apporter des nuances, aide à se forger un avis. »

Thierry Harcourt.

L’adaptation en France de la pièce Une vie allemande marque la quatrième collaboration entre le metteur en scène Thierry Harcourt et Judith Magre, après Rose en 2011, L’amante anglaise en 2016 et Une actrice en 2018. Une histoire de complicité…

Brunhilde Pomsel est décédée à Munich en janvier 2017, à l’âge de 106 ans.

Une vie allemande, à partir du 3 octobre 2022 au théâtre de Poche-Montparnasse.

Si vous désirez aller plus loin :

Goebbels, de Peter Longerich, aux éditions Héloïse d’Ormesson. 874 pages. 30,00€.

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