« Auschwitz. Not long ago. Not far away » : l’exposition-événement prolongée à New York…

Alors qu’Israël et le monde ont commémoré ces derniers jours le 75ème anniversaire de la libération du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz, le Museum of Jewish Heritage, situé au sud de Manhattan, à New York, annonce la prolongation de son exposition-événement inaugurée en mai 2019, Auschwitz. Not long ago. Not far away, jusque fin août 2020.

Présentée jusqu’en février 2019 au Canal Art Center de Madrid et après deux prolongations et plus de 600.000 visiteurs, cette exposition a été l’une des plus plus visitées en Europe en 2018.

Trois étages du Museum of Jewish Heritage de New York sont donc actuellement dévolus à cette exposition sans précédent, la plus grande jamais proposée au public sur l’univers concentrationnaire de l’Allemagne nazie, et de son principal site : Auschwitz-Birkenau.

Au total, ce sont plus de 700 photographies, documents, objets ou témoignages provenant de collections particulières et d’une vingtaine d’institutions dans le monde qui convient le visiteur à un voyage dans la Mémoire, et dans ce qui fût, il n’y a « pas si longtemps, pas si loin », le plus grand centre d’extermination jamais créé par l’homme, pour l’homme.

En guise d’introduction à cette plongée dans l’un des épisodes les plus sombres de l’histoire contemporaine, un wagon de déportation original a été installé sur l’esplanade du musée, identique à celui présenté au Mémorial de Yad Vashem, à Jérusalem.

Entre 1910 et 1927, environ 120.000 wagons identiques ont été fabriqués et utilisés par la Deutsche Reischbahn pour le transport de marchandises, reconvertis à partir de juin 1940 par l’Allemagne nazie pour transporter ses hommes au front, mais aussi et surtout déporter des millions de Juifs, tziganes, homosexuels, opposants politique ou soldats soviétiques vers l’Est, promis pour la majeure partie d’entre eux à une mort certaine. Environ quatre-vingt personnes étaient entassées dans ces wagons de 20m² pour un voyage qui pouvait durer plusieurs jours, vers une destination que nul ne connaissait.

« Ce wagon est l’un des symboles les plus importants du projet d’extermination de masse des Juifs ainsi que de la haine et de la terreur de l’occupation européenne par l’Allemagne nazie contre les minorités. Il est aujourd’hui présenté à moins de deux miles de la Statue de la Liberté, un symbole de liberté et d’espoir pour les immigrants en quête d’une vie meilleure aux Etats-Unis. Cela nous rappelle la raison pour laquelle nous devons nous souvenir de ce passé tragique. La liberté, la démocratie, les droits de l’homme et la justice ne sont pas offerts à tous. Il est de notre responsabilité de protéger ces valeurs.« 

Dr. Piotr M. A. Cywiński, directeur du Musée National Auschwitz-Birkenau.

Initialement bâtis pour les opposants politiques dans le but de les « rééduquer », les camps de concentration n’eurent, dans les premiers temps, qu’un rôle relativement marginal pour les Juifs et les autres minorités dans le processus d’extermination de masse.

Mais en novembre 1938, la Nuit de Cristal, au cours de laquelle des milliers de civils allemands avec à leur tête des hommes de la S.S., de la Gestapo, des chemises brunes ou encore des jeunesses hitlériennes vont se livrer au plus grand et le plus tristement célèbre pogrom de l’histoire, va marquer un tournant décisif dans la politique antisémite de l’Allemagne nazie. En quelques heures, des milliers de maisons, d’écoles, d’hôpitaux et de magasins juifs vont être attaqués et pillés, des cimetières profanés, 267 synagogues saccagées et incendiées, plus de 2.000 juifs assassinés, et 30.000 autres arrêtés et déportés.

Accusés d’être eux-mêmes à l’origine de ces émeutes, les Juifs sont condamnés à payer une amende d’un milliard de marks de réparation pour les dégâts qu’elles ont engendrées.

Les nazis vont utiliser la Nuit de cristal afin de justifier les déportations des Juifs vers Dachau ou Buchenwald au seul motif de leur appartenance ethnique, pour la première fois depuis 1933. Les semaines qui suivirent le pogrom allaient voir le renforcement des mesure antisémites visant à isoler plus encore les Juifs d’Allemagne. Exclus de toute vie professionnelle, sociale et politique, les enfants Juifs sont exclus des écoles, et les adultes de leur emplois. L’ensemble de leurs biens est confisqué, l’accès aux parcs publics, aux théâtres, aux cinémas ou aux musées leur est désormais interdit.

En 1940, tombée sous le joug de l’Allemagne nazie, une grande partie de l’Europe vit à l’heure allemande, et ses Juifs sont soumis aux Lois de Nuremberg. En avril, Heinrich Himmler, chef de la S.S., décide la construction d’un camp de concentration dans une paisible ville de Pologne : Oswiecim (« Oshpitzin » en Yiddish). Un camp à la vue de tous, dont le but premier est de renforcer la toute puissance du Reich et d’instaurer un climat de peur et de défiance sur les populations polonaises locales.

Les premiers prisonniers, une trentaine de criminels allemands et de quelques trois cents Juifs de la région, arrivent à Auschwitz en mai 1940 pour débuter la construction du camp sur les restes de baraquements militaires polonais abandonnés.

Dès le mois suivant, le premier convoi, composé de 720 prisonniers — opposants politiques, socialistes, communistes — arrive à Auschwitz.

Après avoir abandonné le projet de déporter l’ensemble des Juifs hors des frontières du Reich au profit d’une extermination systématique et totale, une conférence est organisée début 1942 pour déterminer les modalités de la Solution Finale de la Question Juive en Europe. En quatre-vingt-dix minutes, quinze hauts fonctionnaires du Reich vont décider, dans une villa de Wannsee, dans la région de Berlin, du sort des quelques onze millions de Juifs d’Europe, dont déjà plus de 800.000 ont déjà été assassinés.

Commandé pendant plus de quatre ans par Rudolf Höss, qui reprendra pour Auschwitz la devise du camp de Dachau où il était affecté précédemment, « Arbeit micht frei » (Le travail rend libre), et à l’origine destiné aux prisonniers de guerre soviétiques, Auschwitz, à la situation ferroviaire favorable, était en passe de devenir le site le plus important de l’Holocauste, utilisé à la fois comme camp de concentration et centre d’extermination.

Dans le parcours de l’exposition, le bureau de Rudolf Höss, fabriqué comme tout le mobilier du camp par les premiers prisonniers, ainsi que de nombreux objets lui ayant appartenu sont d’ailleurs présentés.

Zélé et entièrement dévoué à Heinrich Himmler, Höss va porter « l’efficacité » du camp à son paroxysme, exterminant jusqu’à 320.000 Juifs en deux mois, et mettant parallèlement en place la déportation des Juifs de Hongrie à partir de mai 1944, la dernière communauté d’Europe à avoir été épargnée. Sur les quelques 800.000 Juifs de Hongrie, plus de 600.000 seront déportés et assassinés à Auschwitz, ou abattus sur les rives du Danube en l’espace de quelques mois.

L’avancée de l’armée russe et la chute des lignes allemandes vont conduire à un évacuation précipitée d’Auschwitz. Ordonnée par Himmler, le but de cette évacuation était d’éviter que les détenus ne tombent vivants entre les mains des Alliés, et ne leur fournissent les preuves des massacres nazis.

Du 18 au 21 janvier 1945, après avoir brûlé documents et archives, et dynamité les crématoires afin de ne laisse aucune preuve, le camp est évacué, et plus de 60.000 personnes jetées sur les routes pour une marche de la mort d’une soixantaine de kilomètres. Quand les troupes soviétiques vont arriver et libérer le camp, des dizaines de prisonniers que les nazis avaient laissé là, pensant qu’ils ne survivraient pas, les attendront.

Entre des milliers d’effets personnels, ils vont découvrir plus d’un million de vêtements, près de 45.000 paires de chaussures, ainsi que sept tonnes de cheveux, revendus à des entreprises allemandes pour fabriquer des vêtements.

Composé de trois camps au total — Auschwitz I, Auschwitz II – Birkenau, et Auschwitz III – Monowitz —, Auschwitz-Birkenau sera à l’origine du plus grand massacre humain de tous les temps. Plus de deux millions et demi de personnes y seront assassinées, dont plus d’un million de Juifs.

Parmi les très nombreuses oeuvres, photographies, documents, effets personnels présentés dans le parcours de l’exposition Auschwitz. Not long ago. Not far away et provenant essentiellement d’institutions internationales telles Yad Vashem à Jérusalem, la Maison d’Anne Frank à Amsterdam, l’Auschwitz Jewish Center, le Musée d’Auschwitz-Birkenau, l’U.S. Holocaust Memorial Museum de Washington ou encore la Wiener Library for the Study of the Holocaust and Genocide de Londres, une centaine proviennent directement du fonds du Museum of Jewish Heritage de New York, le troisième plus grand musée du monde sur l’Holocauste, qui a accueilli depuis son ouverture en 1997 plus de deux millions et demi de visiteurs.

Auschwitz. Not long ago. Not far away, au Museum of Jewish Heritage jusqu’au 2 mai 2021.

Si vous désirez aller plus loin :

Auschwitz. Les nazis et la Solution Finale, de Laurence Rees, aux éditions Livre de Poche. 475 pages. 8,20€.
Holocauste, une nouvelle histoire, de Laurence Rees, aux éditions Livre de Poche. 872 pages. 9,90€.
La mort est mon métier, de Robert Merle, aux éditions Gallimard. 384 pages. 8,50€.
Si c’est un homme, de Primo Levi, aux éditions Pocket. 213 pages. 6,40€.
Histoire de la Shoah, de Georges Bensoussan, aux édition PUF. 128 pages. 9,00€.
Le commandant d’Auschwitz parle, de Roflf Hoess, aux éditions La Découverte. 280 pages. 12,00€.
Une vie, de Simone Veil, aux éditions Livre de Poche. 352 pages. 7,90€.
L’aube à Birkenau, de Simone Veil, aux éditions Les Arènes. 300 pages. 20,00€.
Atlas de la Shoah. La mise à mort des Juifs d’Europe. 1939-1945, de Georges Bensoussan, aux éditions Autrement. 96 pages. 19,90€.

Et pour la jeunesse :

La Shoah, des origines aux récits des survivants, de Philip Steele, aux éditions Gallimard jeunesse. 96 pages. 19,95€.
Auschwitz, l’histoire d’un camp d’extermination nazi, de Clive Lawton, aux éditions Gallimard Jeunesse. 48 pages. 14,00€.
Rescapés de la Shoah, de Zane Whittingham et Ryan Jones, aux éditions Flammarion. 96 pages. 15,00€.
Histoire de la Shoah : de la discrimination à l’extermination, de Clive A. Lawton, aux éditions Gallimard jeunesse. 8 pages. 14,00€.
Auschwitz, de Pascal Croci, aux éditions EP. 64 pages. 16,00€.

1 commentaire sur « Auschwitz. Not long ago. Not far away » : l’exposition-événement prolongée à New York…

  1. La plupart des vêtements de déportés devaient être rayés bleu et gris. Mon père s’était empressé de se débarrasser de son habit de déporté infesté de poux. Il avait été déporté principalement à Auschwitz. Sur certaines photos l’habit de déporté apparaît rayé de marron et beige. C’est le cas de celle « Pink triangle » ci-dessus, ou de la chemise de déporté vendu 16000 dollars que mentionné le site timesofisrael : https://fr.timesofisrael.com/une-chemise-de-deporte-vendue-en-ligne-16-000-dollars/ En fait il semble que ce soit un problème technique, si on visionne la photo avec un appareil d’une autre luminosité, ou avec un autre réglage des couleurs ,les bandes bleus et grises sont visibles. Néanmoins les bandes bleues sont quelquefois très foncées. Les couleurs se sont elle modifiées avec le temps ?

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