De Chicago au désert du Néguev : « America », d’Ofir Raul Graizer

Eli avait quitté Israël encore tout jeune, et il avait émigré à Chicago, dans le pays du rêve et de tous les possibles : l’Amérique, le lieu de l’ailleurs par définition même.

Il menait sa petite vie de maitre-nageur sauveteur dans une piscine municipale où chacun, collègues, élèves et parents d’élèves, l’appréciait à sa juste mesure d’homme calme, doux et pondéré.

Eli avait fui une enfance difficile à cause, essentiellement, d’un père policier hyper violent qui le battait, et qui avait mené la mère jusqu’au suicide. Eli en avait même changé de nom pour mieux signifier, symboliquement, la distance : Eli Greenberg était devenu Eli Cross.

Enfant, Eli avait été sauvé par une passion qu’il partageait avec son ami Yotam : la natation. Ensemble, dirigé par Muti, le père de Yotam, ils s’entrainaient persuadés qu’ils arriveraient à participer aux Jeux Olympiques sous les couleurs israéliennes.

Lorsqu’il apprend la mort de son père, Eli retourne en Israël et, bien entendu, il rend visite à son ami Yotam. Si Elie a gardé un lien avec la natation à travers son métier, Yotam en revanche s’en est totalement détaché : il est maintenant gérant d’un magasin de fleurs avec celle qu’il va épouser prochainement, la très belle juive éthiopienne Iris.

Les deux hommes, pour célébrer la joie de se retrouver, décident de partir ensemble en excursion auprès d’une cascade naturelle qu’ils chérissaient enfants. Une sorte de retour aux sources, au sens strict. Mais le destin va frapper : Yotam est victime d’un accident qui le plonge dans le coma.

Il va falloir le courage permanent d’Elie, d’Iris, et des parents de Yotam – plus un certain nombre de péripéties comme seul le destin sait les tricoter – pour redonner vie et espoir à Yotam.

Le film d’Ofir Raul Graizer possède une sorte de poésie flamboyante et d’esthétique baroque qui n’est pas sans rappeler certains opus de Pedro Almodovar. Comme chez le maitre espagnol, les personnages sont tout à la fois profondément incarnés et vecteurs d’un lyrisme émouvant, autant chairs que silhouettes, autant présences que symboles. Chacun d’eux est associé en permanence à une couleur qui semble le caractériser, le représenter, l’illustrer : le bleu des flots pour Elie, le vert de la nature pour Iris et l’orange du soleil pour Yotam.

Et l’on suit avec émotion et passion ce récit édifiant d’un homme qui avait consacré sa vie à sauver les autres, et qui ne parvenait pas se sauver lui-même.

America, d’Ofir Raul Graizer.

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