L’auteur libanais Sabyl Ghoussoub récidive. Après Le nez juif, son premier roman paru également aux éditions de l’Antilope, il livre « Beyrouth entre parenthèses », un road movie moyen-oriental aux périples improbables, mêlant réalisme le plus cru et phantasmes identitaires. Un récit plein d’humour, de questionnements… et de colère également.
Né à Paris en 1988 dans une famille libanaise, Sabyl Ghoussoub a été Directeur du Festival du film libanais à Beyrouth de 2011 à 2015. En 2019, il a été commissaire de l’exposition C’est Beyrouth à l’Institut des Cultures d’Islam de Paris. Il a également collaboré à l’ouvrage Le Liban n’a pas d’âge. 1920-2020, qui devrait être publié en novembre 2020.
Alors que dans son précédent ouvrage, son entourage – ou presque – le prenait pour un juif, notre héros aspire maintenant à entrer dans la gueule du loup : aller en Israël. Il dira : « A force d’entendre parler d’Israël depuis que je suis petit, haïr ce pays à tout-va, le voir condamné de tous les maux de la planète, je n’ai eu qu’une seule envie : m’y rendre.«
Mais il faut compter sans tous les préjugés, ses obsessions, ses angoisses, ses névroses et ses à priori énormes qui lui ont fait penser, par exemple, que manger un falafel au Marais financerait directement Tsahal.
Le ton est lancé. La plus grande partie du livre se déroule à l’aéroport Ben Gourian de Tel-Aviv, où il subira un questionnaire musclé par une soldate de Tsahal et des policiers israéliens de la sécurité. Il dira de la soldate (pas aussi sexy que dans ses phantasmes) : « elle cherche juste à me déstabiliser, me perturber, à voir si je suis prêt à obéir à ses ordres , à me soumettre.«
Les questions fusent et se répètent, inlassablement, inquisitrices : « quel est le nom de votre père ? Et de votre mère ? Pourquoi ce voyage en Iran ? Chez qui allez-vous en Israël ? Quels sont le noms de vos amis ?… Et les réponses, aussi cocasses qu’improbables, le poussent toujours à avoir à se définir sur tout. Une seule chose compte pour lui : faire ce qu’ils veulent, mais ne pas appeler sa mère ; toute sa famille n’est pas au courant de ce voyage, qu’ils condamneraient totalement.
Le héros est photographe et met en scène des personnages en situation de tragédie et d’horreur. Mais alors qu’il s’apprêtait à inaugurer le vernissage de cette exposition à l’institut Français de Beyrouth, celui-ci a été annulé par les services culturels français car jugé choquant et pouvant « raviver des tensions. » Il a du mal à se trouver sa place entre ses deux pays, le Liban et la France.
En Israël, chez son amie Rose, il découvre un univers en pleine ébullition, le monde ashkénaze, le mode de vie oriental, les amis anti militaristes, avec qui il se crée une étrange familiarité.
Le récit, vif, incisif, est porté par des remarques parfois brutales et souvent subjectives sur l’État hébreu et sa population. Et le nombre incroyable de films, d’images, de documentaires, de reportages sur Israël lui feront dire :
Laissez-vous porter par ce voyage insolite, parfois partial, par un homme qui a pensé faire ce voyage pour mettre de coté sa part libanaise, mettre Beyrouth « entre parenthèses ».
Beyrouth entre parenthèses, de Sabyl Ghoussoub, aux éditions de l’Antilope. 114 pages. 16,00€.
Si vous désirez aller plus loin :
Le nez juif, de Sabyl Ghoussoub, aux éditions de L’antilope. 128 pages. 16,00€.
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Cet article a été publié sur Cultures-J le 17 août 2020.