« Raoul Hausmann, un regard en mouvement », au Musée du Jeu de Paume

Pour la première fois en France, le musée du Jeu de Paume consacre une rétrospective au photographe autrichien Raoul Hausmann, pionnier du collage et du photomontage, et cofondateur du Dada Berlin, mouvement artistique, littéraire et intellectuel du début de 20ème siècle.

Fer de lance de l’art abstrait, écrivain, plasticien, directeur de revues, Raoul Hausmann, surnommé « Le dadasophe », fut le plus grand agitateur du Berlin des années 20, et livra en l’espace d’une décennie une oeuvre colossale de plus de mille photographies, dont un certain nombre furent exposées du vivant de l’artiste.

L’exposition suit un parcours chronologique, et débute donc dans l’Allemagne des années 10, revenant sur le mouvement Dada et présentant dans les premières salles des dessins, des estampes, ainsi que quelques rares exemplaires de la revue Der Dada, qu’il fonda en collaboration avec Johannes Baader.

Loin de chercher la perfection dans son travail, développant même une pratique profondément personnelle, c’est aussi dans les dunes de la mer Baltique et de la mer du Nord qu’il ira puiser les inspirations de ses premiers clichés, avant de créer le « Club Dada » à Berlin en 1918, là encore aux côtés de son ami Baader, mais également de Franz Jung ou encore Hannah Höch entre autres, rencontrée trois ans plus tôt, et qui deviendra sa compagne jusqu’en 1922.

Une salle consacrée à la période « Berlin, 1927-1933 » revient sur l’époque à laquelle Raoul Hausmann collaborera à la revue a bis z, organe des artistes progressistes de Cologne, une revue dont les rédacteurs portent des noms illustres, tels Walter Stern ou Franz Seiwert, et qui ne comptera que trente numéros, édités d’octobre 1929 à février 1933. Une date qui coïncide avec celle de sa fuite d’Allemagne, quelques semaines après l’arrivée d’Hitler au pouvoir.

Accompagné de son épouse Hedwig Manckiewitz et de Véra Broïdo, à la fois sa muse et sa maîtresse, Raoul Hausmann va trouver refuge pour trois ans en Méditerranée, sur l’île d’Ibiza. Un exil forcé au cours duquel il s’intéressera particulièrement à la lumière et à l’architecture des façades blanches qui jonchent l’île.

Un exil en appelant un autre, puis encore un autre, Raoul Hausmann devra quitter Ibiza lorsque la guerre d’Espagne éclate en 1936, se verra expulsé de Suisse, où il est suspecté d’être un agent communiste, fuira ensuite la Tchécoslovaquie après la Nuit de Cristal, et trouvera finalement refuge en France, à Limoges, où il arrive épuisé, et contraint de vivre dans le dénuement le plus complet.

Organisé en collaboration avec Le Point du Jour de Cherbourg, où l’exposition s’est tenue du 24 septembre 2017 au 14 janvier 2018, ce sont près de 130 clichés en noir et blanc – dont certains exposés à Zurich du vivant de l’artiste – qui invitent le visiteur à un voyage désordonné et tourmenté, à la fois du point de vue photographique que du point de vue historique.

Raoul Hausmann, un regard en mouvement, jusqu’au 20 mai 2018 au Musée du Jeu de Paume.

Si vous désirez aller plus loin :

Raoul Hausmann : Photographies, 1927-1936, aux éditions le Point du Jour. 39,00€.
Raoul Hausmann : Ibiza, 1933-1936, aux éditions AAM. 127 pages. 20,00€.
Raoul Hausmann : Dadasophe, de Berlin à Limoges, aux éditions Dilecta. 208 pages. 25,00€.

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