Le château de Vaux-le-Vicomte, une page ouverte sur l’Histoire de France…

Avec l’arrivée des beaux jours et leurs week-ends ensoleillés, que diriez-vous d’une petite escapade à quarante-cinq minutes de Paris, à la découverte d’un lieu chargé d’histoire, et aujourd’hui le plus grand monument privé de France ?

Avec son parc de 500 hectares et un château de plus de 2.500m², le domaine de Vaux-le-Vicomte, en Seine-et-Marne, est le rêve d’un homme du Grand Siècle : Nicolas Fouquet.

Né en 1615, éduqué chez les jésuites, il est nommé surintendant des finances en 1653 par le cardinal Mazarin, Premier ministre de Louis XIV, avec pour mission principale le rétablissement des finances de l’État, en banqueroute après la Guerre de Trente Ans qui visait à réduire l’influence des Habsbourg sur l’Europe.

Avec la dot de son épouse et les revenus liés à sa fonction, Nicolas Fouquet peut débuter les travaux du domaine qu’il a acheté douze ans plus tôt en région parisienne, à mi-chemin entre les résidences royales de Vincennes et de Fontainebleau. Raffiné et grand amateur d’art, il va faire appel aux noms les plus illustres de l’époque : l’architecte Louis le Vau, le décorateur Charles Le Brun et le paysagiste André Le Nôtre. Les trois « Le »…

Après une première collaboration au château de Vincennes, les trois hommes se retrouvent donc de nouveau sur un même chantier, et vont faire de l’ancien manoir médiéval fortifié de Fouquet l’un des plus beaux châteaux de l’époque.

Entre classicisme et baroque, Louis Le Vau, à qui l’on doit également l’urbanisme de l’Ile-Saint-Louis, choisit pour les façades du château la pierre blanche de Creil, provenant des carrières de Saint-Maximin, dans l’Oise, plutôt que les classiques briques rouges qui furent un temps envisagées, mais qui seront cependant conservées pour les communs. Dans le corps principal du château, Le Vau va créer un vestibule ouvert et transparent offrant une perspective et une visibilité complètes sur l’axe majeure du domaine, depuis la grille d’entrée jusqu’au bout du parc. Articulé autour d’un « salon » ovale, exemple unique dans l’architecture française, ce vestibule conserve quatre bustes de l’époque de Fouquet représentant les romains Octavie, sœur d’Auguste, Britannicus, Octavie, épouse de Néron, et Hadrien. Culminant à plus de vingt mètres de haut, sa coupole devait à l’origine accueillir une fresque de Charles Le Brun, le Palais du Soleil, projet qui ne sera jamais mené à son terme en raison des aléas de l’Histoire et de la disgrâce de son commanditaire par le roi, auquel était pourtant dédié cette fresque.

Le Brun se changera de dessiner l’ensemble du mobilier et des éléments des décoration, parmi lesquelles plus de cent-vingt tapisseries et, seuls éléments n’ayant jamais quitté le château depuis le 17ème siècle, deux tables de marbre noir, actuellement présentées dans l’antichambre.

Enfin, André Le Nôtre se charge de transformer les terrains alentours en jardins à la française, les premiers de ce style dans l’histoire.

En 1859, Louis XIV, roi de France, effectue son premier séjour à Vaux-le-Vicomte, puis un second l’année suivante avec son épouse, l’infante Marie-Thérèse d’Autriche.

Mécène érudit et aficionado des arts, Nicolas Fouquet protèges les artistes. Molière, La Fontaine, Madame de Sévigné, Corneille ou Perrault créeront à Vaux-le-Vicomte certaines de leurs plus grandes oeuvres, parfois lues ou jouées au cours des fêtes fastueuses et renommées de Nicolas Fouquet. A tel point que Mazarin ira même jusqu’à demander à Fouquet de recevoir à Vaux-le-Vicomte les hôtes les plus prestigieux du royaume de France. Une fortune, une notoriété et un rayonnement supérieurs à ceux du Roi Soleil lui-même, et qui ne seront pas du goût de tous. Dans l’ombre, Colbert, intendant privé du cardinal Mazarin, va œuvrer pour mener à sa perte le surintendant des finances, et ainsi être nommé à son poste. L’accusant d’utiliser les fonds du Trésor à des fins personnelles, Colbert n’aura de cesse d’influencer Louis XIV afin de le faire destituer.

A la mort du cardinal Mazarin en mars 1661, Nicolas Fouquet espère légitimement hériter du poste de Premier ministre laissé vacant. Mais à la surprise générale, Louis XIV décide de gouverner seul et de ne pas nommer de successeur. Ayant perdu son protecteur et principal soutien, le déclin de Nicolas Fouquet était amorcé.

Le 17 août 1661, pour la troisième fois, Louis XIV se rend à Vaux-le-Vicomte, où son surintendant organise une fête en son honneur. Promenade, souper, feux d’artifice, le faste de cette réception sans précédent dans l’histoire verra également la toute première représentation des Fâcheux, une pièce spécialement écrite et montée par Molière pour l’occasion.

Jaloux de tant de tant de luxe et d’opulence alors que ses propres demeures sont vides, et convaincu par les calomnies de Colbert, Louis XIV ordonne l’arrestation de Nicolas Fouquet, qui sera arrêté trois semaines plus tard à Nantes par D’Artagnan. Accusé de malversations et de crime de lèse-majesté, deux crimes punis de peine de mort, sa famille et ses proches sont exilés, et l’ensemble de ses biens saisis par le roi. Les meubles, peintures, livres, tapisseries, tapis, et même les orangers et arbrisseaux du château entrent dans la collection personnelle du souverain.

« Le 17 août, à six heures du soir, Fouquet était le roi de France ; à deux heures du matin, il n’était plus rien. »

Voltaire.

Privé d’avocat, devant faire face à dizaines de pièces falsifiées et aux calomnies incessantes de Colbert, en charge de l’organisation du procès, Nicolas Fouquet attendra trois ans avant qu’un jugement ne soit rendu. Les juges demanderont le bannissement de l’accusé, provoquant le mécontentement de Louis XIV qui élargit la peine en vertu des pouvoirs de justice qui lui sont conférés, et condamne Fouquet à la prison à vie.

Tentant de venir en aide à celui qui fut leur mécène, certains artistes réclameront l’indulgence du roi, comme La Fontaine qui composa par exemple Elégie aux Nymphes de Vaux. Vaine tentative…

S’il échappe à la peine de mort, Nicolas Fouquet passera près de vingt ans à la forteresse de Pignerol, dans les Alpes, où il mourra en mars 1680. Deux ans plus tard, la cour de France s’installe à Versailles, dans un luxueux palais dont l’architecture, la décoration et les jardins sont signés… Louis Le Vau, Charles Le Brun et André Le Nôtre.

Abandonné et mis à mal par les siècles et les révolutions, Vaux-le-Vicomte sombre dans l’oubli. Après être passé dans les mains de nombreux propriétaires et héritiers n’ayant plus les moyens d’en assurer l’entretien, il est de nouveau mis en vente en 1875 par son propriétaire de l’époque, Gaston de Choiseul.

C’est donc d’une demeure sans éclat, abandonnée depuis trente ans, et de jardins envahis par les herbes que se porte acquéreur Alfred Sommier, industriel du sucre et amateur d’art, au cours d’une vente aux enchères le 6 juillet de la même année — vente à laquelle il est par ailleurs le seul à assister. Amoureux du domaine qu’il vient d’acquérir pour un peu plus de deux millions de francs-or, il n’aura qu’une ambition : rendre à Vaux-le-Vicomte son lustre d’antan.

Une restauration générale des bâtiments est engagée, la demeure est petit à petit remeublée avec du mobilier d’époque ou reconstitué, et les jardins, fontaines, grottes et cascades retrouvent leur splendeur, à l’exception cependant des parterres qui seront achevés par Edme, le fils d’Alfred Sommier, au début du 20ème siècle. L’ensemble du domaine est ouvert au public en 1967 par Patrice de Voguë, descendant d’Edme Sommier.

Lieu de tournage de nombreux films et séries — Angélique et le Roy, L’homme au masque de fer, James Bond : Moonraker, La folie des grandeurs… —, Vaux-le-Vicomte est aujourd’hui la plus importante propriété privée de France classée au titre des Monuments historiques, et accueille chaque année plus de 300.000 visiteurs.

Le temps d’une journée ou d’un week-end, plongez donc dans l’un des joyaux du Grand Siècle et de l’Histoire de France, et partez à la découverte du château de Vaux-le-Vicomte.

Si vous désirez aller plus loin :

Vaux-le-Vicomte : château & jardin, de Patrice de Vogüé et Lynda Frenois, aux éditions Scala. 62 pages. 9,00€.
Un jour à Vaux-le-Vicomte, de Alexandre de Vogüé et Ascanio de Vogüé, aux éditions Flammarion. 190 pages. 24,90€.
Le château de Vaux-le-Vicomte, de Jean-Marie Pérouse de Montclos et Georges Fessy, aux éditions Scala. 207 pages. 29,00€.
Fouquet, de Jean-Christian Petitfils, aux éditions Tempus Perrin. 640 pages. 11,00€.
Le procès Fouquet, de Simone Bertière, aux éditions Livre de Poche. 512 pages. 7,60€.
Louis XIV. Tome 1 : le Roi Soleil, de Max Gallo, aux éditions Pocket. 448 pages. 7,50€.
Louis XIV. Tome 2: l’hiver du Grand Roi, de Max Gallo, aux éditions Pocket. 352 pages. 7,50€.
Mazarin, le maître du jeu, de Simone Bertière, aux éditions Livre de Poche. 950 pages. 9,50€.
Colbert, de François d’Aubert, aux éditions Tempus Perrin. 624 pages. 12,00€.

Et pour la jeunesse :

Le Masque de fer, suivi de Fouquet et d’Artagnan, de Pierre Brochard et Guy Hempay, aux éditions du Triomphe. 39 pages. 15,90€.
Louis XIV, de Stéphanie Ledu et Cléo Germain, aux éditions Milan. 32 pages. 7,60€.
Louis XIV, de Bruno Wennagel et Mathieu Ferret, aux éditions Quelle Histoire. 40 pages. 5,00€.

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