Argentine 1960 : « Mon voisin Adolf », de Léon Prudovsky

Marek Polsky vivait bien tranquille dans son petit coin de campagne, quelque part au fin fond de l’Argentine. C’était le début des années soixante, et tout était calme, très calme, dans sa vie.

Jusqu’à ce qu’un nouveau venu, un Allemand tonitruant, s’avise d’acheter la maison voisine.

Il en fait du bruit, ce voisin : il est massif, colérique, braillard, escorté par une espèce de Gorgone hystérique et blonde qui semble lui tenir lieu tout à la fois de secrétaire, avocate, femme d’affaire et peut-être même de maîtresse. Son déménagement est assuré par de solides gaillards, blonds aux yeux bleus, lookés dans le plus pur style arien. Une véritable caricature ambulante.

Tant et si bien que, très vite, une illumination surgit dans le cerveau de Marek Polsky. Et si ce voisin, ce prétendu Herman Herzog, n’était autre qu’Adolf Hitler lui-même ? Certes, Hitler est supposé mort, suicidé dans son bunker berlinois, mais l’on sait que les soviétiques rechignèrent à présenter sa dépouille. Alors ?

Il faut dire que le pauvre Marek a perdu toute sa famille ; il faut dire que Marek est un survivant du ghetto de Varsovie et du camp d’Auschwitz ; il faut dire qu’Adolf Hitler, Marek l’a croisé une fois dans sa vie, à l’occasion du championnat du monde d’échecs auquel il participait, en 1934 ; il faut dire qu’à l’époque, en 1960, l’Argentine venait juste d’être marquée par l’arrestation d’Adolph Eichmann, après une longue traque des plus rocambolesques.

C’est ainsi que nous est narrée l’enquête minutieuse menée par Marek sur son mystérieux voisin. Le ton est celui d’une comédie douce-amère qui ne recule ni devant les situations absurdes, ni devant les répliques cinglantes.

Mais l’on perçoit, souterrainement, toute la tendresse éprouvée par le cinéaste pour cette génération des survivants, et pour la paranoïa qui leur avait été laissée en héritage au quotidien.

Mon voisin Adolf, de Léon Prudovsky : un film très drôle sur une situation très amère.

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