« The Good Person », d’Eitan Anner : se vendre a un prix !

Sharon porte en elle, depuis toujours, le traumatisme d’un père qui s’est suicidé sous ses yeux.

Sur les premiers contreforts de la cinquantaine, elle est encore belle et énergique mais elle n’a su, sa vie durant, ni garder les hommes , ni s’occuper de sa fille Alma, ni faire fructifier sa maison de production.

Quand le film commence, elle est quasiment à la rue, son appartement vidé par les huissiers, n’ayant plus de quoi manger, vivre, se reposer, dormir. Elle aurait besoin, de façon urgente, que quelqu’un la sauve.

Ce quelqu’un pourrait-il être Uzi Silver, ex-réalisateur de renom devenu rabbin ultra-orthodoxe depuis trente ans et qui, par un incompréhensible caprice, veut soudainement revenir au cinéma pour adapter « Samuel », chapitre 18 à 31 – l’histoire du roi Saül et de la voyante -avec, dans les principaux rôles, lui-même et son épouse, Eva, ex-star devenue femme au foyer ?

De Sharon, on pense, et on dit clairement, qu’elle est un peu folle : ce projet sera-t-il une nouvelle folie à son actif ou bien le début d’une renaissance ?

Rien moins qu’un paradoxe pour une productrice habituée à travailler des films ambitieux qui défendent la cause des femmes et leur libération que de devoir se plier au bon vouloir d’un homme profondément misogyne, par éducation et devoir…

C’est ainsi que l’on va suivre, avec délectation, les pérégrinations tragi-comiques de la jeune femme, rusant pour survivre sans se renier, surfant entre les obstacles financiers, culturels, matériels, risquant sa vie pour la cause d’un film auquel, au final, elle ne croit guère.

L’ensemble baigne dans un délicieux noir et blanc presque vaporeux qui caresse les visages et les sourires et dont s’évadent, par moment, quelques rares séquences en couleur, celles du film en train de se fabriquer. Comme si la fiction seule pouvait redonner quelques couleurs à une réalité par ailleurs si amère. Comme s’il était problématique de retrouver la joie de vivre dans une société profondément déchirée entre Sharon et Uzi Silver, entre les paillettes du spectacle et les « tsitsit » de la religion.

The Good Person, d’Eitan Anner.

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