« Quelque part dans le désert » : Ron Amir au musée d’Art Moderne de la Ville Paris

Présentée en 2016 au Musée d’Israël à Jérusalem sous le titre Doing time in Holot, la toute première exposition personnelle internationale du photographe israélien Ron Amir arrive à Paris dans le cadre de la saison France-Israël 2018.

A partir du 14 septembre et jusqu’au 2 décembre 2018, les quelques trente photographies grand format et six vidéos de Quelque part dans le désert prennent donc leurs quartiers sur les murs et les cimaises du musée d’Art Moderne de la Ville de Paris.

Souvent à mi-chemin entre le témoignage et le document, le travail de Ron Amir, particulièrement attaché à la notion de « communauté », est clairement engagé, et se concentre sur les situations sociales complexes auxquelles doit faire face l’Etat hébreu depuis plusieurs années, principalement liées à l’immigration illégale venue de la frontière avec l’Egypte.

Ouvert en décembre 2013 afin de réduire la concentration d’étrangers illégaux dans les principales villes du pays, et principalement Tel Aviv et ses quartiers sud où ils se sont essentiellement installés, le centre de détention de Holot, dans les plaines de Nitzana, dans le Neguev, constitue le sujet essentiel de Quelque part dans le désert. D’où son nom…

Lorsque Ron Amir arrive pour la première fois à Holot, quelques mois après sa mise en activité, il n’a pas d’idée précise sur ce qu’il vient y chercher. Il y restera durant près de trois années, arrivant très tôt le matin, avant même l’ouverture du centre, et photographiant le quotidien des 3.500 réfugiés soudanais et erythréens qui y sont détenus de trois mois à un an. Mais plutôt que de montrer la détresse humaine, comme l’on pourrait s’y attendre avec ce genre de sujet, Ron Amir a choisi de se focaliser sur un autre aspect de la vie de ces réfugiés : leur tentative de construire une vie commune. Aucun portrait donc, aucune scène de vie, mais uniquement des constructions de fortune faites à partir de sable, de bâtons, de pierres et de planches faisant office de huttes communautaires, de salle de sport, de cuisine, et même de mosquée, dans un soucis de rendre leurs conditions de détention moins pénibles. La création comme échappatoire…

Si la solitude, l’ennui et l’attente transpirent clairement de cette série de photographies, Quelque part dans le désert est, au-delà de son aspect artistique, un engagement social et politique.

A l’instar de l’Europe, elle aussi confrontée à une immigration massive favorisant une émergence historique des partis les plus à droite, Israël et le gouvernement de Benyamin Netanyahou font également face à un dilemme de poids divisant la société quant à l’accueil à réserver à ces réfugiés.

Le 18 janvier 2018, trente-cinq des écrivains les plus importants du pays, dont Amos Oz, David Grossman, A.B. Yehoshua, Zeruya Shalev ou encore Etgar Keret, ont adressé une lettre au Premier ministre israélien pour l’exhorter à renoncer au plan d’expulsion des demandeurs d’asile.

« Nous vous demandons d’agir avec la moralité, l’humanité et la compassion qui font la valeur du peuple juif. Faute de quoi nous n’aurions pas de raison d’exister. »

Le centre de détention de Holot sera définitivement fermé en mars 2018. Selon les autorités israéliennes, plus de 40.000 migrants originaires d’Afrique vivraient actuellement en Israël.

Quelque part dans le désert, jusqu’au 2 décembre au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris.

Si vous désirez aller plus loin :

Quelque part dans le désert, le catalogue de l’exposition, aux éditions Paris Musées. 117 pages. 19,90€.

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